Avec cette série canadienne diffusée en 2008, Steve Markle et Jeff Kassel se sont donnés comme personne pour arracher des rires, quitte à aller parfois trop loin.
Big testees
Le créateur Kenny Hotz, scénariste chez South Park réputé pour son écriture propre au cartoon trash a abordé ce nouveau projet de sitcom sans dévier de ses habitudes. Et les situations improbables dans lesquels il plonge les deux malheureux comédiens peuvent sincèrement consterner les âmes les plus sensibles. Car si voir Randy March avec une paire de testicules de 20 kgs amuse, contempler les transformations physiques spectaculaires des deux bonhommes ne produit pas forcément une adhésion générale. Les frères Farelly ont expérimenté ce genre si compliqué de comédie titillant la dignité humaine élémentaire. Et les mutations du corps provoquent presque la même gêne que devant un film de Cronenberg.
Le sujet est pourtant brillant de simplicité et aurait pu être exploité sur au moins deux saisons. Deux amis vivant sous le même toit travaillent pour l'industrie pharmaceutique. Enfin, il est plus honnête de préciser qu'ils servent de cobayes pour la nébuleuse entreprise Testico. Ils subissent donc épisode après épisode les effets dévastateurs de ces produits destinés à terme à la grande consommation. Et voir les deux amis soumis à des supplices très imaginatifs est amusant. La souffrance des autres c'est vieux comme le muet, et ça marche.
À côté des innombrables blagues scatologiques qui constellent l'unique saison de Testees, on trouve une poignée d'épisodes qui n'ont rien à envier aux séries à succès de l'époque. L'épisode dans lequel les colocataires testent un shampoing à l'ananas qui les rend aveugles est un sommet de causticité. Nugget, leur encombrant voisin qui a besoin d'un toit pour la nuit s'invite chez eux sans qu'ils n'en rendent compte. Se croyant tout seul, Steve se laisse aller à une passion inavouable et mémorable.
Les effets volontaires
D'autres épisodes se distinguent particulièrement : les fameux anti douleurs XXL, qui permettent à Steve d'entamer une relation fleure bleue - de son point de vue - avec une maîtresse SM qui ne peut que déprimer devant son manque de réaction, l'épisode Jellybean omelette pour le malheureux Steve en bave des ronds de chapeau. Il est souvent question d'abus sur personne en état de faiblesse. Les limites du corps humain sont allègrement dépassées quand Steve se croit enceinte en raison de son ventre très rond, ou qu'une super glue colle le visage de ce même Steve au mauvais endroit. Les technologies novatrices, évidemment agressives, doivent plus à Tex Avery qu'à Black mirror (l'aspirateur autonome, la ceinture de chasteté électronique pour homme...).
Le charme de la série tient évidemment à ce duo improbable. Le fragile Steve Markle qui a des faux airs de Fadela Amara, et Jeff Kassel au regard globuleux et flippant donnent de leur personne dans ces histoires pourtant difficiles à tenir. L'épisode où ils perdent la mémoire à cause d'une pilule, et que leur enfoiré de voisin - toujours le même ! - leur fait croire qu'ils sont en couple - et mieux qu'ils avaient l'intention de faire le coming out sous forme d'union charnelle devant leurs amis et leur famille est infaisable maintenant, mais ultra efficace. Et puis on ne va pas le cacher, il y a des épisodes plus faibles qui ressemblent à des cascades de Jackass. Malgré ces lourdeurs absolues et l'absence de personnage féminin intéressant, Testees demeure, grâce à son esprit loufoque et décomplexé, très sympathique. Gênant parfois mais souvent drôle.
Au petit jeu de la série la plus comique sous estimée qui aurait mérité plus de temps pour se développer, c'est probablement Testees qui me viendrait à l'esprit spontanément.
Il n'est pas trop tard pour la tester...