The Keepers est une série documentaire de 7 épisodes diffusée sur Netflix. Elle a pour moi la lourde tâche de succéder à une autre série documentaire de Netflix, Making a Murderer, qui était d’une grande qualité. Avec du recul ces deux affaires n’ont en commun que le fait d’être raconté de façon épisodique. The Keepers et Making a Murderer ont ainsi, de par leur format, la force de nous proposer un récit passionnant mais surtout choquant. Dans les deux cas on se retrouve devant une histoire incroyable et on ne peut que se dire « je ne suis qu’au troisième épisode, mais qu’est-ce que je vais découvrir de pire que ça ? ».
Au départ j’ai trouvé que The Keepers était maladroite dans son introduction, peut-être de par la présence de ces deux « détectives » qui ont tentés de nous introduire à cette disparition de Sœur Kathy et de sa mort et sur les évènements qui ont directement suivi cet évènement et notamment la mort de cette autre jeune fille à quelques jours d’intervalle. J’aurais peut-être préféré une introduction qui ne présentait pas encore les protagonistes de l’investigation d’aujourd’hui. Les quatre épisodes suivants sont passionnants à suivre, l’histoire est raconté de façon plus ou moins chronologique, l’histoire prend une ampleur toujours plus importante. Partant d’un meurtre non élucidé on bascule dans une histoire glauque de pédophilie à grande échelle et d’implication douteuse entre église et autorité (policière et judiciaire). En cela cette histoire vaut le coup d’être vu tant elle est incroyable et dont il apparait difficile de douter d’une part de sa véracité au vu de la multitude des témoignages.
Pour autant une des faiblesses de ce documentaire à mon sens comparé à Making a murderer c’est l’omniprésence de témoignages qui compose essentiellement le fil de cette reconstitution, alors même que l’autre série Netflix avait la richesse de se baser sur une multitude de preuves (plan, enregistrement, pièces à conviction). Certes les deux histoires ne sont en rien comparables et la base des éléments qui composent les documentaires sont forcément liés aux affaires. D’autant plus que lorsque l’on regarde The Keepers ont comprend vers la fin les différentes raisons qui font que ces preuves matérielles sont si absentes. Pour autant cela faisait de Making a Murderer un documentaire vraiment très fort et immersif que The Keepers n’a pas réussi à égaler.
L’autre point qui me pose problème avec ce documentaire c’est la complexité de l’histoire. On part au départ d’un meurtre, pour aboutir à une vaste affaire politique qui implique de nombreuses personnes. Plusieurs pistes autour du meurtre de Cathy ont été évoquées pendant tout le documentaire, mais je regrette que le final ne se soit pas plus centré sur une synthèse de ces pistes et que des hypothèses n’aient pas été plus mises en avant par les « enquêtrices ». Je pense qu’à ce stade elles avaient suffisamment d’éléments pour émettre des suppositions que le téléspectateur aurait pu garder en tête. Certes elles n’ont pas la réponse, mais elles semblent suffisamment proche et c’est dommageable de ne pas avoir tenté des hypothèses de conclusions. De la même manière toute l’affaire politique apparait comme morcelé, beaucoup de personnes et d’organisations semblaient impliquées et je pense que le final aurait pu bien plus pointer du doigt et synthétiser les trous de cette affaire. Au final The Keepers a décidé de conclure sur les victimes de Maskell, ce que je ne peux vraiment leur blâmer, parce qu’après tout c’est pour elles que Cathy se battait. Mais ce documentaire laisse tout de même un drôle de sentiment d’inachevé et pas tant parce que nous n’avons pas toutes les réponses qu’on espérait, mais parce que la conclusion m’a semblé bien brouillonne.
Pour autant, on ne pourra pas reprocher à The Keepers d’avoir, à la différence de Making a Murderer, pris lourdement parti dans son sujet. La série a laissé de nombreuses pistes ouvertes, n’a exclus que peu de choses, les « enquêtrices » n’ont pas arrêté de vouloir trouver des preuves, de tenter de toujours corroborer les témoignages avec des faits. En cela le travail est remarquable et il vaut le coup d’être vu.