The Knick nous plonge dans le quotidien du personnel médical du Knickerbocker Hospital à New-York, en 1900. A noter que ce dernier n'a rien de fictif, il a réellement existé, ouvert de 1862 à 1979, s'appelant "J. Hood Wright Memorial Hospital" pour ensuite prendre le nom de Knickerbocker en... 1913. Bon alors là vous vous dites qu'ils se foutent un peu de notre gueule, faire une série sur un hôpital et même pas être foutus de l'appeler correctement, y à de quoi s'inquiéter.
Que nenni. Parce que The Knick, c'est une série qu'elle est bien. The Knick renouvelle le genre des séries médicales, et même au-delà. Il est rare de voir une série avec une force pareille de par les thèmes abordés , et par l'époque (et le lieu) à laquelle prend place l'action. Il est question de racisme et de discrimination, d'inégalités sociales (pauvres-riches, hommes-femmes), et bien évidemment des percées scientifiques majeures, l'époque choisie étant celle qui a connu le plus de bouleversements dans ce domaine.
Riche en problématiques, The Knick nous tient en haleine du début à la fin, à travers un environnement sombre et électrisant. Soderbergh excelle à la mise en scène, et chose rare il a étroitement collaboré pour chaque épisode. Ambiance neutre (dans le Knick tout n'est que noir ou blanc), alternance entre plans léchés et mouvements de caméra à l'épaule pour mieux s'immiscer au cœur du Knick, tout y est. Les opérations et autres procédures chirurgicales sont elles aussi très bien filmées, au point même de vouloir fermer les yeux pour quelques séquences.
Si Soderbergh maitrise derrière la caméra, les acteurs excellent eux devant. Mené par l'impeccable Clive Owen, le reste du casting impressionne. C'est agréable de retrouver des têtes connues du septième art, à l'image de Kevin Spacey dans House of Cards ou Matthew McConaughey et Woody Harrelson dans True Detective, souvent gages de qualité.
Un petit mot sur la BO, même si tout a déjà été dit, qui est électronique et très bien concoctée par Cliff Martinez (ancien batteur des Red Hot Chili Peppers, excusez du peu). Très minimaliste, elle colle parfaitement à l'ambiance générale et au rythme cardiaque des personnages.
The Knick passe la société aux rayons-X, et tout le monde en prend pour son grade. Cette série est le portrait sans concessions d'une Amérique encore jeune, mais profondément raciste, misogyne, corrompue et obscurantiste. Le racisme est ordinaire, illustré par le docteur Edwards (Andre Holland) qui n'y fait même plus attention, et surtout par cet épisode 7 épique (et effrayant) qui met en scène la haine viscérale des new-yorkais contre les noirs.
La misogynie est présente à divers niveaux mais surtout illustrée par Cornelia Robertson (Juliet Rylance), qui se bat pour être reconnue par son père et son époux. Par ailleurs elle constitue une figure de proue de la lutte contre l’obscurantisme, avec Sœur Harriet (Cara Seymour), la nonne pratiquant l'avortement.
Enfin, il faudrait parler du thème principal : la médecine. Car oui, malgré la multitude de thèmes présentés, tous convergent en un point : le Knick. L'heure est alors aux découvertes médicales, certaines fondatrices, et donc irrémédiablement à une certaine course à la gloire. Thackery en est l'exemple le plus parlant : certes brillant, il refuse néanmoins de partager son savoir avec d'autres praticiens, et ira même beaucoup plus loin, au point de mettre en danger la vie de certains de ses patients dans le "simple" but de devancer un de ces collègues quant à une découverte scientifique majeure.
Toutes les procédures médicales ne sont alors que des expérimentations. Et c'est cela qui renouvelle le genre médical à la télévision et rend la série fascinante. Fini les technologies de pointe ou les énigmes résolues en 42 minutes. Inutile de dire que dans ces circonstances, les erreurs de jugement sont légion et que les amateurs de sang ou de gore se rassurent : il y a de quoi vous séduire dans The Knick. Il faudra d'ailleurs passer le troisième épisode pour qu'un patient survive à une opération.
A l'image de la cocaïne pour Thackery, le show nous rend littéralement accros. Avalée en quelques jours, cette saison 1 laisse entrevoir de belles choses pour la saison 2. Rendez-vous donc a l'automne 2015 pour toujours plus de prouesses médicales. Car maintenant c'est officiel : Dieu a un rival.