J'avais vraiment peur. Après le naufrage d'Uncharted (sur un autre média, le cinéma), j'avais peur qu'on massacre une autre des licences les plus cinématographiques du jeu vidéo. Le choix des acteurs m'a également déçu dans un premier temps : Bella Ramsay ne ressemble absolument pas à Ellie, et Pedro Pascal est trop impliqué dans d'autres rôles pour incarner un personnage aussi charismatique que Joel. Mais il faut laisser sa chance au produit.
L'introduction du premier épisode, très ancrée dans notre réalité et différente du jeu (le covid et la peur de nouvelles maladies virales dans un talk show américain) est étonnante (big up à John Hannah, toujours un bon choix) et très immersive.
J'en profite pour faire un point sur l'immersion : pour moi, le jeu vidéo est un média évolué du cinéma (surtout quand les studios comme Naughty Dog brisent les barrières entre les deux médias). Il y a deux différences majeures qui vont dans ce sens :
- La durée (entre 15 et 30 heures pour le jeu vidéo en moyenne) permet des développements et un attachement aux personnages démultiplié, à qualité d'écriture égale avec ce qu'on peut voir au cinéma où les durées moyennes sont beaucoup plus courtes (tout au plus 3 heures).
- La plongée dans la peau du/des personnages joués : que ce soit en POV ou à la 3ème personne, à force de tuer/mourir/éviter des pièges/faire des choix douloureux et voir leurs conséquences, il y a quelque chose que le cinéma ne pourra jamais concurrencer, et vers lequel il finira peut être même par tendre (cinéma et films interactifs, réalité virtuelle...).
Le format sériel réduit de fait le premier biais en étalant la durée, mais The Last Of Us version série est un bon exemple : on n'arrive jamais à atteindre le niveau d'immersion de son ainé manette en main.
Alors l'histoire se déroule, sans surprises pour celui qui la connait mais avec un plaisir accru d'épisodes en épisodes. Les phases marquantes du jeu sont respectées, et on sent que Neil Druckmann est à l'écriture car personne ne massacre le matériau de base (RIP Uncharted). Parfois, il y a quelques clin d'oeil dispensables au modèle du jeu vidéo ("Viens Ellie, monte sur mes épaules pour faire tomber cette échelle") et je ne comprends toujours pas quel est le besoin de faire çà, mais c'est suffisamment léger pour ne pas être un point négatif.
Le vrai point positif est la mise en retrait de l'action, et même des zombies. C'est un choix scénaristique fort, mais totalement logique pour développer une histoire qui se veut plus centrée sur les choix réalisés par des humains dans une situation aussi critique que la fin du monde. La série n'est d'ailleurs jamais aussi bonne que quand elle fait un pas de côté et raconte une autre histoire, une histoire de destins brisés dans ce monde brisé (Henry et Sam, Bill et Franck...)
J'ai enfin noté un gros problème de rythme, qui m'empêche de mettre une note plus haute : Les épisodes ont tous une durée différente et leur découpage n'est pas vraiment opportun (le premier épisode par exemple), ce qui est dommage parce que le jeu avait bien rythmé son histoire autour de quatre saisons. Au delà de cette limite formelle, il est parfois étrange de passer plus d'une heure sur l'histoire de Bill et Franck (encore une fois j'ai adoré cet épisode, mais j'aurai aimé que tous aient la même considération), mais seulement 40 minutes sur un climax un peu rushé au vu des enjeux qu'il amène.
En conclusion, si je dois mettre de côté ma déception de ne pas avoir pris autant de plaisir qu'en jouant à un de mes jeux préférés (je suis de toute façon biaisé, comme j'ai pu le dire plus haut), je dirais que la série est solide, mais qu'elle convient peut être plus à ceux qui ne sont pas au fait du génie de Druckmann et de Naughty Dogg (mais qui ont le coeur accroché, parce que cette histoire est quand même horrible). Est ce que j'ai hâte de voir la saison 2 sachant ce qui s'y passe ? Lol.