Donc il reste des romans de John Le Carré à adapter. Hugh Laurie, le fameux acteur de Black Adder, est de retour. Et Susanne Bier, Danoise spécialisée selon wikikipedia dans les films sur « la souffrance, la tragédie et l'expiation » , réalise. Mais parlons plutôt de l'histoire.
Le joli générique met en relation les signes extérieurs de richesse et la violence qui les fonde. La charogne sous la beauté. Le luxe, le calme et la cruauté. Comme si la prospérité se fondait jamais sur autre chose.
Une bonne mère vertueuse qui vit dans la sobriété, incarne la justice opposée à la realpolitik. Et, attention spoiler,
la morale (du talion) triomphe de la raison d'état
. Ces nouvelles figures féminines fictionnelles de la justice ne sont pas des Electre, et on est loin de la tragédie grecque. C'est plus satisfaisant pour le spectateur? Dans le monde réel, Eva Joly ne gagne pas à la fin. Zorro et Santo n'épousent pas mère Theresa et n'ont pas de nombreux enfants.
La réalisation est sobre, la photo jolie, collant au bel emballage que s'est confectionné le Dr Bloodmoney. Sur six heures, on a droit à un peu d'action au début, et un peu à la fin. Dans l'avant-dernier épisode, les garçons se verront récompensés de leur patience par une symphonie d'explosions et de gerbes de napalm, avec une séquence de démonstration incongrue (je croyais que ce genre de négoce nécessitait de la discrétion?). Le reste du temps, les filles profiteront du visage du héros en gros plan, et de ses aventures avec tous les personnages féminins d'entre vingt et quarante ans (soyez patients les garçons, il y aura un bout de sein dans une séance de torture! à la toute fin). Et de la villégiature à la plage.
Une telle absence de péripéties crée un suspense. Il finira bien par se passer quelque chose. Tout le monde manipule tout le monde, mais les masques vont tomber. Bon, qui était vraiment dupe au départ? La "candeur" de Mr Roper à l'égard de son nouveau protégé est difficile à avaler... Et l'entourage familial des trafiquants sait ce qui se cache sous le vernis chatoyant de civilisation.
Une fois qu'elles se sont trouvé un Galahad, la ligue des femmes pour la vertu (pas au sens de Machiavel) va donner une bonne leçon aux méchants garçons. Dans une fiction, elles triomphent au bout de 6 heures de programme, pas après des siècles de luttes.
Il faut reconnaître à cette oeuvre le mérite de nous montrer les collusions entre le crime et la bureaucratie, les intérêts convergents entre trafic et diplomatie, et que la « corruption » constitue le fonctionnement naturel des sphères du pouvoir. Il serait toutefois préférable que ce genre de considérations constitue le contexte, et non le but de la démonstration. Sauf à vouloir faire ricaner les personnes concernées, devant la naïveté supposée des spectateurs de genre de « révélations ».
A part ça je suis déçu parce que mon personnage favori, bon, soyons objectif, le seul personnage intéressant, n'est pas vengé à la fin - lui.
Et si je me tapais un bon vieux Wesley Snipes?
Que deviennent les gars qui ont fait mine d'enlever le gosse, pendant que le héros est dans les vapes?
Comment les conducteurs des camions comprennent-ils qu'ils doivent en sortir avant leur explosion à la fin?