Au début, on sourit doucement, on se dit « putain Nico, t’es sérieusement tombé dans l’auto-parodie ». J’ai regardé l’épisode 1 d’1h30 en m’imaginant le remonter pour qu’il ne dure que 45 minutes, en gardant toutes les scènes, tant le rythme apathique que NWR a initié dans le Guerrier Silencieux est poussé à son paroxysme. On sourit, on s’ennuie un peu, mais il y a quelque chose qui s’installe, une ambiance. Et puis vu que je suis plutôt client de tout ce qu’a fait le monsieur jusqu’ici, j’ai pas lâché l’affaire. Je me suis dit : « visiblement, t’as pas grand chose à dire... Only God Forgives est superbe, je suis un des rares à le défendre… Mais il dure 1h30… Comment vas-tu tenir sur 12h ? Tu vas forcement vite montrer tes limites... ».
Et en fait c’est l’effet inverse qui se produit : le rythme de Too Old To Die Young traîne tout du long, mais plus on avance dans la série, plus on est sous le joug de cette mise en scène poseuse. Les enjeux sont placés délicatement, un par un, pour nous mener vers une violence que l’on sent inéluctable. Sur le fond, NWR parle d’une Amérique malsaine, corrompue et chargée de haine sous l’ère Trump, mais avouons-le, la critique sociétale reste un prétexte. Ces 10 épisodes sont avant tout l’espace de jeu parfait pour que NWR développe des personnages tous plus barrés et charismatiques les uns que les autres, avec une mise en scène au cordeau. Chaque plan est composé, éclairé avec soin (merci Darius et Diego), et riche de sens. Lorsqu’elle n’est pas fixe, la caméra se contente de panoter sur un monde qui semble sous cloche. Il y a clairement une distance qui se créé dans ces plans entre le spectateur et les personnages mais le recul qui est créé intègre une dimension presque mystique à l’œuvre. Ces protagonistes monolithiques deviennent tels des statues divines tandis que les symboles bibliques fusent autour d’eux (le serpent et cie). Bref toute la force de TOTDY est de donner une ampleur fascinante à une petite histoire de guerre de cartel sans grande originalité.
Et bien heureusement, l’humour reste toujours à flot dans ce bain de sang. Et c’est ici que j’invite ceux qui considèrent que le réalisateur danois s’est perdu dans son propre nombril à le réhabiliter. Il a beau avoir un style extrêmement « prétentieux », il ne manque pas de recul sur ce qu’il propose. L’humour (noir) présent dans sa série est un excellent moyen de nous le prouver. Il faut y être sensible par contre, mais ça c’est un autre sujet !
En tout cas la bonne nouvelle c’est qu’on voit ce que ça donne quand un cinéaste majeur a carte blanche sur plus de 8 mois avec une équipe de talent. On aime, on aime pas, mais on oubliera pas.