Terminus pour la mort

Encore un sympathique drama policier-fantastique signé OCN ! Bon en même temps il faut dire que c’est un peu la spécialité de la maison, mais c’est toujours agréable de regarder une série bien ficelée, écrite convenablement, avec des acteurs satisfaisants, le tout tenant en douze épisodes au lieu des seize habituellement proposés par l’industrie. Le rythme est prenant du début à la fin, quasiment sans baisse de régime et avec de nombreux rebondissements pour toujours nous enjoindre à voir la suite.

Train nous narre l’histoire d’un flic réputé pour son flair qui se retrouve à la tête d’une équipe spécialisée dans les crimes difficiles (comprenez serial killers). Après quelques péripéties dont je ne vais pas révéler la teneur afin de vous laisser le plaisir de la surprise, notre héros (Seo Do-won de son nom) se retrouve projeté dans une dimension parallèle. Là-bas, tout paraît identique à son monde d’origine, à quelques exceptions près. Au même moment, son « lui » de l’univers alternatif se voit transporté dans l’univers du héros que l’on suit depuis le début (le Do-won « normal » quoi).

À partir des connaissances glanées dans sa dimension d’origine et celles qu’il trouve dans la dimension alternative (du fait de légers changements provoqués par une action que son « lui » alternatif a réalisé douze ans auparavant), Do-won va chercher à attraper le serial killer qui menace sa bien-aimée… C’est un peu confus expliqué comme ça mais tout fait sens une fois devant l’écran : la narration de Train est très efficace, dense sans être confuse et sait jouer juste ce qu’il faut avec les flashbacks afin de ne pas trop nous perdre dans la masse des informations.

Le fil rouge qui va lier les différentes dimensions sera double. D’abord, une affaire de meurtres en série (encore !) qui recèle son lot de surprises étant donné que le suspect possède comme notre héros la capacité de faire des va-et-vient entre les deux dimensions et qu’il s’en sert bien sûr pour mener les enquêteurs en bateau… Ensuite, une romance entre le héros et une femme à laquelle il est lié pour des raisons qui divergent selon la dimension en question, et contre laquelle tout semble aspirer à nuire...

Contrairement aux autres séries criminelles où les histoires de cœur sont souvent secondaires, dans Train elle joue un rôle central pour l’intrigue et offre à mesure que celle-ci avance des scènes tout à fait mémorables et chargées en émotion, dont la radicalité tranche de façon originale avec ce qu’offre d’habitude l’industrie. Le drama développe au fil des épisodes une galerie de personnages imposante qui requiert de la part du spectateur une attention sans faille, au risque de se voir largué par le truchement des temporalités et les informations multiples qu’elles apportent au décodage de l’histoire.

Celle-ci se révèle progressivement très intéressante sur le plan moral, interrogeant notamment le poids de nos choix et de leurs conséquences sur les vies de chacun : y a-t-il toujours nécessairement une bonne décision à prendre sur une mauvaise ? Une mauvaise action peut-elle être effacée ou est-elle condamnée à rester viciée jusqu'au bout, peu importe nos efforts pour essayer de la réparer ? Les interprétations à retirer des pérégrinations de notre héros entre plusieurs mondes ne sont pas négligeables et offriront leur lot de réflexions plus ou moins profondes : j'applaudis en tout cas l'effort fait de ce point de vue-là, c'est peu commun !

Train profite en tout cas d’une réalisation au poil, nerveuse sans être épileptique, et d’acteurs tous très justes dans des rôles souvent doubles (voire triples !) du fait des différentes dimensions. Mention spéciale à Yoon Si-yoon, impeccable dans un rôle qui semble lui avoir été taillé sur mesure : quelle force dans les sentiments, quelle sensibilité ! Un sans-faute de ce côté-là.

Les seuls reproches que l’on pourrait faire au drama seraient sa propension à user et abuser de ficelles dramatiques bien connues des amateurs de séries policières pour accroître le suspense et construire une tension qui nuit modérément à la crédibilité de l’intrigue, ainsi qu’une fin un peu too much à mon goût, qui aurait pu gagner à être un peu moins gentille compte-tenu des révélations faites au cours du dernier épisode. Train n’en demeure pas moins un très bon moment qui se dévore une fois passés les premiers épisodes avec ses protagonistes attachants et son histoire remarquablement bien écrite !