On pourrait, et on écrira sans doute énormément sur Treme. La série est incroyablement sociétale, là où The Wire, dans toute sa perfection et son ambition démesurée, s'attachait en fait plus à des corps de métier et au fonctionnement de la ville, qu'à ses habitants. Simon choisit ici de parler de la vie, dans ce qu'elle a de lente, de monotone parfois, de normale... Bien sur, il ne choisit pas n'importe quelle ville, et il s’intéresse au drame de Katrina, aux défaillances de l'administration... Mais la nouvelle Orléans se remettant de ses blessures, l'auteur prend le temps de laisser émerger la vie, petit à petit. Si David Simon a quelque chose d'unique, parmi ses congénères, c'est qu'il voit loin, sur une longue distance. Si dans The Wire il se permettait de ne faire démarrer l'"écoute" qu'aux deux tiers de la saison, il va ici bien plus loin dans sa lenteur. Treme s'essaye pour ainsi dire à un exercice assez unique de transformation saison après saison. Il part du quotidien banal, festif, de cette communauté, pour peu à peu le noyer dans la criminalité. C'est un peu comme si on prenait des gens de tout les jours, et qu'on les plongeait contre leur grès dans une série policière. De fait, le flic de la série, joué par David Morse, occupe une très petite place dans la première saison, puis en prends de plus en plus, comme si Simon avait pris soin de nous présenter la ville, avant de s'attacher, une nouvelle fois, à sa criminalité. Dans la deuxième saison, l'ambiance est différente, le danger rôde, le drame est au coin de chaque rue... et c'est parce que l'on a gouté à cette vie de fête et d'artistes, que l'on souffre de la voir détruite.
Qu'on ne s'y trompe donc pas. Sous ces airs parfois ronflants, Treme a tout de l'ambition géniale de son auteur. Beaucoup plus que la tranche de vie anecdotique de musiciens et autres cuisiniers, Treme illustre le destin, la renaissance, et le déclin d'une ville. C'est bien d'une ville dont il est question, comme c'était le cas dans the Wire.