Chef-d'oeuvre valaisan !
Une série comique reprenant les codes des vieux feuilletons policiers sauce rétro au fin fond du canton le plus "bras cassé" de Suisse : ne serait-ce pas la meilleure idée née en helvétie (après le...
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le 5 nov. 2024
Une série comique reprenant les codes des vieux feuilletons policiers sauce rétro au fin fond du canton le plus "bras cassé" de Suisse : ne serait-ce pas la meilleure idée née en helvétie (après le chocolat au lait) ?
Tschugger c'est génial, tout simplement. Rarement ai-je vu une production suisse aller autant à fond dans son délire, assumant parfaitement une esthétique des années 80 et un humour particulièrement crado à base de blagues en-dessous de la ceinture et d'hémoglobine. En temps normal, je me serais énervé face à cette idéalisation d'une ère d'antan (ici appliqué dans une ère contemporaine, nota bene), mais le contexte est ici tellement pittoresque et relatable qu'il m'est impossible d'en vouloir à la série. Elle a du coeur, de l'ambition, et déborde d'idée et d'envie parfois cinématographiques (on va y venir). Cette réussite, on la doit indéniablement au co-créateur de la série et interprète principal : David Constantin. Un individu sorti de nul de part mais qui, en l'espace d'un seul premier épisode, fait instantanément de l'ombre à tout le monde. Le personnage qu'il campe, Bax, un policier qui se prend pour un flic de Beverly Hills, est aussi détestable qu'attachant. Con comme un pied mais par moment très touchant. Un régal. Presque aussi iconique que son compère, le gentil Pirmin, l'archétype du gentil policier suisse qui se laisse trop facilement marcher dessus, magnifiquement jouré par Dragan Vujic. L'alchimie entre les 2 personnages est tout simplement savoureuse et n'est que renforcée par le reste du casting interprétant des personnages plus barrés les uns que les autres. Tout y est pour se taper des barres de rires au cours d'enquêtes d'apparence banales mais abouttissant à des complots mettant en péril le Valais voire même le monde. Ma foi, quand je dis qu'il y a de l'ambition dans Tschugger, il y en a, rien qu'en considérant l'ampleur du projet !
Théroiquement, la série est divisée en 4 saisons... mais c'est en réalité plus compliqué que ça, et c'est là où le bas blesse un peu. La saison 1 et 2 forment en fait un dyptique, la première partie finissant sur un cliffhanger. Quant à la saison 3, elle débute avec une toute nouvelle intrigue conclue par une quatrième saison... qui est en fait un film. Décortiquons cela :
(CORRECTION : Quelques semaines après mon visionnage du film, j'ai découvert que la saison 4 est désormais disponible en ligne sous forme de série, en plusieurs parties donc. Le final n'est donc fondamentalement pas un vrai film, mais ça ne change franchement pas grand chose à sa qualité)
Saison 1 (première partie du premier dyptique)
Le décor est planté, l'intrigue est lancée. La série se lâche dès ses débuts et se permet une narration très sale gosse à base d'idées tordues et de faits réels. Les personnages sont instantanément iconiques et sont rapidement plongés dans une mystérieuse affaire dont on veut aussitôt en savoir plus. Un début très prometteur donc !
Saison 2 (deuxième partie du premier dyptique)
De loin la meilleur saison. Plus folle, plus barrée et surtout plus ambitieuse. Le mystère de la première saison s'éclaircit et la série prend des proportions surprenantes, lorgnant presque sur le cinéma d'action voire le film catastrophe. C'est toujours autant drôle, on se sent pleinement satisfait quand le dernier épisode se termine et surtout, on en veut plus.
Saison 3 (première partie du second dyptique)
Le succès des 2 premières saisons donne des ailes aux créateurs : la série est plus ambitieuse que jamais. Elle quitte les frontières du Valais et fait même place à un casting francophone, apportant fraîcheur et humour linguistique franchement bienvenus. Plus drôle que jamais, cette saison est aussi beaucoup plus sombre, explorant davantage les conflits des personnages, et se permettant même d'en tuer certains. C'est douloureux à regarder, mais ça marche. Cerise sur le gâteau : c'est la seule saison qui se suffit à elle-même, se terminant sur un cliffhanger moins lourdaud que le premier.
Tschugger : Der lätscht Fall (deuxième partie du second dyptique)
L'ambition de David Constantin et de son équipe est claire lorsque débarque en salle l'ultime chapitre de la série : un film de plus de 2h, en réalité la saison 4. La transition du format télévisuel au grand écran se fait sans trop d'accros. Jamais on ne ressent que la série aurait été charcutée pour rentrer dans un long-métrage. Non ce qui dérange ici, c'est que la conclusion est relativement tiède. Les questions que posait la saison 3 finissent ici en pétards mouillés. On suit en réalité 2 grosses intrigues qui n'ont rien à voir entre elles, l'une tirant même dans les pattes de l'autre de par son inutilité. C'est beaucoup trop long pour ce que ça veut raconter, et la fin est complétement ratée, oubliant des personnages importants et se grouillant d'en finir. Honnêtement, à l'heure où je rédige ces lignes, je peine encore à croire que c'est ainsi qu'on doit dire au revoir à tout ce beau monde. L'humour est toujours de la partie, c'est indéniable, mais le résultat final est trop grossier pour qu'on puisse en ressortir satisfait. Très très dommage !
Pour résumer, la série est dans son ensemble excellente mais aurait gagné à être prolongé. J'ai l'impression que David Constantin aurait encore de belles choses à nous raconter, mais il semblerait que Bax ait commis son ultime gaffe. Reste une magnifique oeuvre télévisuelle devant laquelle j'ai ri comme un fou, seul ou en famille. J'aime ces personnages, j'aime cette ambition et surtout j'aime quand la Suisse permet à ses créateurs de se lâcher et de montrer ce qu'on a dans le ventre !
Merci la SRF, merci David Constantin et merci le Valais ! Tschüss zämä !
Créée
le 5 nov. 2024
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