Twin Peaks : that's a damn fine show
Au début des années 1990 dans la petite ville de Twin Peaks est retrouvé le cadavre d’une adolescente, Laura Palmer, jeune fille populaire et apparemment bien sous tout rapport, (the owls are not what they seem). C’est pourtant une autre facette d’elle mais aussi de la petite bourgade tranquille que va faire remonter au jour l’agent du FBI Dale Cooper en menant l’enquête sur son meurtre.
Si tout semble faire croire à une banale enquête policière, David Lynch s’amuse avec les genres et nous entraîne dans une oeuvre faussement simple et vraiment brillante.
En effet, on retrouve le cadre assez classique d’une petite ville américaine avec des habitants assez banals voire stéréotypés : des flics fan de donuts, des jolies serveuses, une bande de lycéennes un peu rebelles, un médecin, le propriétaire d’une station service… rien de bien original en somme.
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Mais là où l’on retrouve la patte de Lynch, c’est que dans cette banalité assez triviale, il instille progressivement une part de surnaturel et d’onirisme. A tel point que certains parlent de TP comme d’une parodie d’enquête criminelle. Il est vrai qu’elle flirte très souvent avec l’absurde et le grotesque (the dancing dwarf s’il faut n’en citer qu’un…) et s’avère carrément drôle : Dale Cooper est pour moi un perso hilarant avec des répliques assez cultes mais il n’est pas le seul, tous les personnages hormis quelques uns sont véritablement comiques. Néanmoins, en mon sens , il ne s’agit pas d’une parodie car l’enquête est loin d’être bâclée. Au contraire, elle tient en haleine et est extrêmement bien construite. On retrouve bien tous les codes de la série policière : une ambiance sinistre (rythmée par le son de la corne de brume) et des détails sordides mêlant prostitution, trafic de drogues…
La série est donc marquée du sceau de la dualité concept cher à Lynch : oscillant entre humour et drame, mais aussi noirceur/humanité des personnages ( cette série est véritable ode aux plaisirs de la vie : Every day, once a day, give yourself a present. La nourriture est omniprésente et que dire des phrases célébrant le café…).
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Schizophrénie frappant donc le déroulé de la série (alternance de moments absurdes et sérieux) mais aussi les personnages. En effet, chacun possède une deuxième nature qu’elle soit fantastique comme bien réelle, se révélant peu à peu. Le double est un des thèmes centraux du show mais aussi de toute la filmographie de Lynch.
Une autre richesse du scénario est le détournement des genres scénaristiques. Comme nous l’avons vu, la série reprend tous les codes de la série policière et de la comédie mais aussi de la série d’horreur/fantastique : les phrases sybillines, les terreurs nocturnes (honnêtement j’ai pas fait la maline lors de l’épisode de la résolution….) mais aussi du … Soap !
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uiuiui vous avez bien lu. Du Soap opera. Nonon j’ai pas craqué.
Je m’explique : les éléments soap sont clairement identifiables : la romance Donna/James assez larmoyante et … chiante. Les twists à la pelle de l’histoire Josie/Catherine. Catherine étant l’archétype de la méchante des bons soap style Feux de l’amour, rire sardonique en prime. Lynch ayant poussé les références jusqu’à l’intégration d’un soap regardé par tous les personnages. La musique jouant son rôle là-dedans : le thème principal est bien dégoulinant de mélo….
En parlant de la musique. Pour tout avouer au début, j’étais assez sceptique voire pas du tout réceptive, je la trouvais trop kitsh, envahissante et pas du tout raccord avec ce qui se passait à l’écran. Puis, j’en suis venue à l’aimer, à l’attendre. Elle participe à cette ambiance assez particulière qui suinte de la série.
Il faut dire que rien n’est laissé au hasard, la musique parfois en décalage est là pour souligner l’absurdité de la scène ou au contraire sa profondeur. De même, les images sont soignées ainsi que les transitions. Rien qu’à voir le générique. (D’ailleurs Fargo me fait fortement penser à cela)
TP s’est donc un peu la révélation de ce début d’année sérielle. J’ai bien conscience de débarquer après tout le monde mais cela a été un véritable choc esthétique, une véritable claque qui me permet de voir toutes les séries que j’ai pu voir jusqu’alors, différemment.
Mais pour autant, je n’ai pas adhéré à tout. Le côté fantastique me laissait franchement perplexe au début mais j’ai appris à renoncer à chercher du réalisme, ce n’est pas ce que Lynch attend de nous. Il faut savoir lâcher prise et se laisser complètement envoûter.