Je suis désolé, c'était trop tentant.
Mais d'un autre côté, ça retranscrit bien l'effet qu'a eu sur moi cette série alors qu'elle découvrait successivement ses trois premières saisons.
Créée en 2013 par Michael Hirst, Vikings est une série historique explorant les temps où les Vikings gouvernaient en maître sur les pays scandinaves, à travers notamment les aventures de Ragnar Lothbrok. Habité par une ambition certaine, il cherchera en effet à convaincre son jarl de naviguer vers l'Ouest, et donc vers des terres inconnues, plutôt que de se cantonner aux raids habituels. Présentée par la chaîne History, la série sera également prétexte à s'attarder sur ce qu'on sait des traditions vikings, telles que leurs croyances, leurs us et coutumes d'inhumation ou de prière, ou encore l'existence d'un oracle.
Alors que sortaient les tout premiers épisodes, une comparaison s'imposait rapidement, incontournable: celle avec une série qui en trois saisons avait déjà rencontré un succès monstrueux: Game of Thrones. La réussite pour Vikings semblait d'ores et déjà difficile, puisqu'elle avait la tâche de se démarquer de cette série, à laquelle on a tendance à rattacher toutes les séries médiévales récentes. Mais finalement, après quelques épisodes qui peinaient à forger une identité propre à la série, et qui dévoilaient un budget serré de la série, ou un manque d'ambition.
Lorsque les vikings débarquent en Angleterre pour la deuxième fois et remportent tous leurs combats alors qu'ils sont cinquante à tout casser... (c'est le cas de le dire haha)
La fin de la saison 1 montre cependant de meilleures choses, avec un acteur principal, Travis Fimmel, qui se démarque davantage, notamment par ses attitudes et sa gestuelle, et des personnages secondaires qui sont plus mis en avant: Lagertha, la femme de Ragnar, jouée par Katheryn Winnick (dont j'aimerais vanter les mérites, mais d'autres l'ont fait avant moi); Rollo, le frère de Ragnar, interprété par Clive Standen; Floki, constructeur menuisier un peu taré sur les bords joué par Gustaf Skarsgard, ou encore le fils de Ragnar, Bjorn. La saison nous laisse d'ailleurs sur un beau cliffhanger qui promettait une belle saison 2.
Et cette promesse fut tenue. Dès le premier épisode de la seconde saison, on prend une véritable gifle qui montre déjà combien la série peut parfois surprendre et avoir des éclairs de génie. Car, si on atteint évidemment toujours pas le niveau de Game of Thrones (Vikings est moins politique, de toute façon, donc la comparaison n'est pas toujours fortuite) en matière de retournements de situation, le série a tout de même son lot de bluffs et de personnages intéressants. On découvre derechef des traditions vikings qui n'avaient pas encore été démontrées en détail: le sacrifice par exemple, ou encore un châtiment particulièrement sanglant. On retrouve une réalisation et une mise en scène au niveau de la saison 1, avec des plans magnifiques du fjord dans lequel vivent Ragnar et compagnie, et de beaux éclairages. J'en profite également pour dire que la reconstitution historique de la série, même si elle contient d'après quelques spécialistes de nombreux anachronismes, est crédible et solide, autant dans les costumes que dans les paysages. Malgré quelques épisodes mous et pas toujours cohérents, Vikings saison 2 offre une version XXL de la première, explorant même des antagonismes insoupçonnés entre les personnages. A ce stade-là, la série proposait un potentiel intéressant et plutôt prometteur.
La saison 3 est la meilleure. De quoi illustrer mon titre (ou le justifier, ça dépend comment on regarde la chose), puisque finalement la série va en s'améliorant, autant dans son ampleur que dans l'impact qu'elle a sur le pauvre spectateur (un peu comme pour Breaking Bad, oserai-je à dire).
Quand je parle d'ampleur, je parle bien sûr du fait que la série n'hésite pas à explorer de nouveaux pays, comme la France par exemple, même si cela rejoint le défaut que j'ai déjà pu formuler par rapport à l'incohérence des choix de certains personnages: Ragnar s'est fait trahir par Ecbert, et au lieu de se venger, va risquer sa vie à Paris.
La réalisation a également tendance à s'améliorer au fil des saisons, mais le contenu de la série n'est pas en reste: Vikings nous propose également, dans sa saison 3, un conflit religieux presque anachronique qui nous fait nous questionner quant à notre placement par rapport aux prises de positions faites dans la série.
Même si j'admire Ecbert qui constitue un personnage machiavélique jouissif, je trouve qu'il ajoute à la série un côté peut-être trop politique qui rapproche du coup la série de Game of Thrones, alors qu'il a fallu une saison entière pour s'en écarter. Non, la partie vraiment intéressante de cette saison 3 se retrouve vraiment dans le traitement des personnages: des personnages qui divergent parfois, et qui combattent tout de même ensemble, créant des relations uniques, à mi-chemin entre la haine et l'amour. Je noterais quand même un léger gaspillage de potentiel lors du dernier épisode de la saison 3, lorsque Ragnar sort de son cercueil pour attaquer les parisiens; ça constitue un joli rebondissement certes, mais peu crédible, vu comment le personnage a évolué durant les épisodes précédents.
[EDIT Saison 4]
A ce titre, il est dommage que la saison 4 soit légèrement en-dessous, en termes de qualité scénaristique notamment. Trois intrigues, voire quatre en début de saison, sont majoritairement poursuivies, ce qui confère à la série le même défaut qu'on pouvait par exemple reprocher à The Walking Dead: une certaine lenteur, et un surplus inutile de complexité narrative. L'arrivée de nouveaux personnages, sans grande profondeur ni grande utilité, parachève ce sentiment d'avoir ici une saison pas vraiment gâchée, mais pas vraiment réussie non plus, tant elle se perd dans des méandres qui confinent parfois à l'anachronisme et à l'impossible historique.
Ici, je pense tout particulièrement à Yidu, l'esclave chinoise qui drogue Ragnar, dont la love story est bien trop prévisible et bien trop inutile; ou encore à Finehair et son frère. "Ah tu veux être roi ? Ah ça veut dire que tu vas attendre la moindre occasion pour me faire un coup de pute ça, non ? Bah allez, viens conquérir le monde avec moi !"
Heureusement, on retrouve les qualités de réalisation qui lui sont propres: les paysages de la Scandinavie, les maquettes, les scènes de bataille accompagnées d'une BO plus que correcte fournissent à la série un crédit non négligeable, dans la lignée des précédentes saisons. Le season finale, et l'ellipse qu'il comprend, relève en beauté le niveau d'une saison qu'on pourrait presque qualifier "de transition": on s'est surtout focalisés sur l'évolution de personnages trop nombreux, avec peu de rebondissements réellement importants pour l'avancée des diverses intrigues; d'ailleurs, même le rebondissement final est moindre par rapport aux autres saisons, ce qui est d'un autre point de vue un moindre mal puisqu'il déjoue toute tentative de prédire la fin de cette saison et introduit à merveille la prochaine.
C'est bien pour ça que je conseille Vikings: une série qui parvient toujours à surprendre, et qui malgré ses petits défauts demeure l'une des meilleurs séries historiques du moment.