Avant toute chose, je tiens à préciser que j’ai beaucoup de tendresse pour la première saison de cette série (la seule que j’ai regardée).
Dès le générique, l’humour satyrique de Marc Cherry est délicieux, et repose sur cette dualité : la féminité d’une part (et tous les codes sociaux qui en découlent selon chaque époque), et la vengeance en violence d’une autre part.
Les décors et costumes extravagants soulignent cet aspect clichesque au possible des héroïnes, qui semblent emprisonnées dans la caricature d’elles-mêmes.
Quelques scènes sont dignes du talent de Marc Cherry, et de sa capacité à adopter le point de vue féminin l’expérience du couple. Toutes subissent la désillusion de l’image d’un couple idéal façonné par la société, leurs maris respectifs n’étant plus des partenaires de vie, mais devenant brutalement des obstacles à leur bonheur et leur réussite (familiale, sociale et financière, dans l’ordre chronologique de ces différents couples).
La séquence de meurtre est excellemment orchestrée : tous les niveaux de l’histoire se superposent, et le lien avec la maison devient plus clair. Ce n’est pas le simple fait d'emménager dans cette maison qui rend les personnages fous, mais bien tout ce qu’elle représente : aisance financière, opulence, et carcans sociétaux quant à la vie de couple.
Les points négatifs sont liés au travail du créateur, soit le manque d’approfondissement des personnages lié à l’exercice nouveau de la série d’anthologie (travail sur le temps court), et la difficulté à sortir des personnages et thématiques qu’il a déjà travaillés, en mieux (Desperate Housewives).
Les 3 différents « morceaux » de cette première saison, bien qu’intéressants et originaux, sont donc assez inégaux. Les 2 premiers couples fonctionnent bien ensemble, car ils exposent deux façons de rétablir un équilibre (Beth Ann en tuant son mari, et Simone en acceptant qu’une nouvelle relation doive être créée).
Pour ce dernier couple à la traîne, il semble difficile de se prêter à la contemporanéité du récit, le couple tombant dans des travers faciles avec la condamnation du trouple comme une nouvelle forme de relation, en faisant appel à femme fatale intéressante jusqu’à ce qu’elle tombe dans le cliché presque du film de genre.
La fin retombe comme un mauvais soufflé pour ce dernier couple, et plus généralement pour cette saison toute entière. Il y aurait pu avoir d’autres fins possibles, qui auraient insufflé un sens plus intéressant à ces histoires qui, quelque part, fonctionnent comme les contes que l’on transmet.
Si tous les conjoints finissaient (accidentellement ou non) par être tués par leur femme, la morale aurait été dramatique mais évidente : les hommes et les femmes ne sont décidément pas faits pour s’aimer, et malgré tous les efforts subsiste une incompatibilité.
Si Eli avait survécu, et que la femme du couple qui récupère la maison ne tuait pas son mari, la fin aurait eu le mérite de laisser une porte de sortie à l’incommunicabilité entre les hommes et les femmes, en montrant que ces couples sont aussi ce que la société fait d’eux, façonnant leur désirs, leur rapport au genre, et leur conception même du couple. Il aurait été intéressant de soutenir l’opinion que tout cela évolue, et les couples avec.
En somme toute, une série agréable, mais où l’on sent que le réalisateur a quelques difficultés avec le temps court de la série et avec la contemporanéité de son dernier couple, ne dépassant pas le simple récit de femmes bourgeoises au cœur brisé. Au récit universaliste d'expérience féminine, il y préfère un ton burlesque et cocasse.
Dommage, ça aurait pu être une perle.