J'ai fait partie des immenses fans de "Desperate Housewives", fleuron parfois très mal perçu du troisième âge d'or des séries TV (celui qui va grosso modo des "Sopranos" à "Breaking Bad"), et je constate avec ironie que la nouvelle création de Marc Cherry bénéficie a contrario de très bons retours du public, alors qu'il s'agit à mes yeux d'une simple resucée "modernisée" du premier triomphe de Cherry.
Ce dernier reprend en effet sa formule gagnante, déjà réutilisée à l'occasion de "Devious Maids" : des héroïnes au féminin, du soap, de l'humour un peu trash et des meurtres.
Pourquoi pas après tout si la recette fonctionne, beaucoup de "créateurs" hollywoodiens ne font pas autrement, et d'ailleurs dans un premier temps on prend plaisir à retrouver la Cherry's touch, ses personnages déjantés et son second degré jubilatoire.
Mais on constate bien vite que la formule jadis gagnante tourne désormais à vide, faute d'avoir su se renouveler - si ce n'est à la marge, la "subversion" ayant gagné quelques galons supplémentaires : désormais il y a un ménage à trois, on voit les fesses de Ginnifer Goodwin, et on peut observer Reid Scott s'envoyer quelques lignes de coke...
De même, la majorités des vannes/punchlines (toujours joliment écrites) ont déjà été entendues - plus ou moins reformulées - dans "Desperate Housewives" ou ailleurs.
Forcément, puisque dans le fond il arrive des péripéties similaires à des personnages très ressemblants : une bourgeoise coincée découvre les infidélités de son mari, un époux gay doit faire son coming out, une quadra superficielle prend un amant très jeune, etc...
A ce sujet, il faut signaler que Marc Cherry a quelque peu perdu son mojo en matière de casting, à l'image du choix de Lucy Liu donc, qui n'arrive pas à la cheville d'Eva Longoria dans un rôle très voisin : cette dernière avait le chic pour faire passer un délicieux second degré dans sa frivolité, là où Liu apparaît juste antipathique.
Heureusement, Ginnifer Goodwin et Kirby Howell-Baptiste s'en sortent un peu mieux, et la distribution reste plutôt satisfaisante, mais certains seconds rôles paraissent mal choisis, à l'image de la faussement bombesque Alexandra Daddario.
L'autre gros défaut de "Why women kill" concerne sa structure elle-même : trois histoires indépendantes situées à des années d'intervalle, qui ne se croisent jamais malgré la jolie pirouette finale. La sensation de regarder trois séries en même temps finit par poser problème, en dépit des efforts du montage et des gadgets narratifs en début d'épisode censés figurer une unité.
Ca passe lors des 2-3 premiers épisodes et lors des 2 derniers, mais la série connaît un terrible ventre mou en son milieu, lorsque le scénario patine sérieusement : la nature artificielle de ces trois intrigues juxtaposées se fait alors cruellement sentir.
Bon, je critique, je critique, mais c'est l'admirateur déçu de "Desperate Housewives" qui parle. Soyons clairs, "Why women kill" n'est pas une purge, loin de là ; seulement la preuve que la série originelle constituait un petit miracle non reproductible, lié à la période, au contexte, et à mes attentes à l'époque - qui ont évidemment évolué.
Ce petit mélange de soap, polar et critique sociale reste sympathique, mais ne saurait désormais me combler, à l'heure où une nouvelle génération semble découvrir les mérites de Marc Cherry.