Sixième album studio de Faith No More, Album of the Year est aussi le premier avec le guitariste Jon Hudson et le dernier avant la longue séparation du groupe. Il marque donc la fin d’une époque, une époque d’ailleurs très troublée étant donné les dissensions entre les musiciens. Le guitariste Dean Menta vient d’être viré parce que ses compositions ne correspondaient pas au style du groupe. L’enregistrement ne se passe d’ailleurs pas dans les meilleures conditions. Non seulement les musiciens sont occupés ailleurs (Mike Patton avec Mr Bungle notamment), mais le producteur Roli Mosimann veut absolument se servir de ProTools, ce qui ne plaît pas au groupe qui ne retrouve pas le son espéré. Tout cela donne un album moins inventif et moins complexe que les précédents. Sans doute moins bons également.
Si elles ne sont pas mauvaises, les compositions apparaissent comme étant très linéaires : « Collision » et « Naked in Front of the Computer » sont construites sur des motifs assez simples par exemple, moins inventives que d’habitude, même si elles conservent toute leur agressivité : « Mouth to Mouth » et ses couplets déclamés. Malheureusement, la magie semble avoir disparu. « Ashes to Ashes » renvoie à des titres d’Angel Dust, sans parvenir à les égaler. Et même si Mike Patton se donne à fond sur ce titre, les riffs épais de John Hudson peinent à convaincre, en dépit des références à Led Zeppelin. La production y est certainement pour quelque chose. Les fans du groupe retrouvent évidemment le côté crooner de Patton sur « Helpless » et « She Loves Me Not », mais il manque un petit quelque chose à la recette. Le second titre n’aurait même pas dû apparaître sur l’album.
Il demeure quelques inventions qui mettent le feu aux poudres, comme sur le puissant et torturé « Got That Feeling » ou le classique « Stripsearch » qui s’inclut dans ce que nous a déjà proposé Faith No More. Retenons aussi le beau « Pristina » qui clôt l’album sur une note mélancolique, après l’angoissant « Home Sick Home » au riff répétitif et au chant halluciné de Patton qui se montre plutôt sobre sur le reste de l’album, bien loin de ses démonstrations habituelles. L’ensemble manque donc d’imagination et d’investissement, ce qui ne surprend pas vraiment ceux qui suivent la vie de Faith No More. Trois singles en sont extraits dont « Last Cup of Sorrow » qui est certainement l’un des bons morceaux de l’album, tandis que le groupe part en tournée avec Limp Bizkit en première partie, ce qui n’a pas vraiment plu à Roddy Bottum. Faith No More se sépare avant la sortie du quatrième single.