You better stay home and do as you’re told, get out of the road if you want to grow old.
Ça faisait bien trop longtemps que je n'avais pas fait une critique dithyrambique. Il fallait me relancer avec une valeur sure : Animals semblait la cible parfaite.
41'42", 5 chansons dont 3 dépassent les 10 minutes, Animals est le 4ème album du "fab four" des Pink Floyd (Dark Side, Wish you Were Here, The Wall). Moins accessible que les autres, moins ambitieux, moins prétentieux, Animals est un chef d'oeuvre de rock progressif. Animals est une ambiance dans laquelle chaque chanson nous permet d'entrer. Animals doit, comme tous les autres certes, mais sans doute un peu plus, s'écouter de bout en bout. Comme une sorte d'annonce du Wall.
L'album est encadré par deux chansons "annexes", Pigs on the Wing part 1 & 2. Déclaration d'amour, balade optimiste, la chanson est en contraste complet avec le reste de l'album. Musique minimaliste, paroles magnifiques. Ce sont donc les paroles qui retiendront notre attention. Les parties sont une éloge à l'amour en général, comme unique résolution à tous les problèmes évoqués de manière on ne peut plus pessimistes dans les autres chansons. Et si Animals était l'album le plus optimiste des Pink Floyd ?
Dogs . Introduction douce puis reprise progressive vers un riff différent vers les 4'. Et c'est ce thème-ci, trop court malheureusement, qui donne toute sa qualité à la chanson. Il nous fait entrer dans une véritable transe entre cris de chiens, synthé, basse et l'envol de la guitare. Le tout rythmé par un Mason en grande forme. Chaque note de guitare résonne comme un cri, et le riff recommence, encore et encore. Sorte de détermination du sort contre laquelle on ne peut rien. C'est comme ça, voilà tout. Et la voix reprend avec un cynisme infini, l'histoire de ces "chiens" que nous avons tous croisés. Transition géniale bien qu'un peu longue, reprise du thème original, puis du thème secondaire. Et cette fin que je remet en boucle, absolument terrible comme apothéose de l'univers floydien, par son anaphore de "who was", résonne sans fin dans mes oreilles et dans mon esprit.
Who was born in a house full of pain.
Who was trained not to spit in the fan.
Who was told what to do by the man.
Who was broken by trained personnel.
Who was fitted with collar and chain.
Who was given a pat on the back.
Who was breaking away from the pack.
Who was only a stranger at home.
Who was ground down in the end.
Who was found dead on the phone.
Who was dragged down by the stone.
Avec Pigs, c'est un nouveau chef d'oeuvre de progressif qui nous est présenté. Un petit moins fin peut-être. Plus accessible par un début plus accrocheur et une structure plus répétitive, ses paroles sont pourtant difficile d'interprétation tant les références et allusions sont nombreuses. Alternance synté/basse au début, ponctuée par des cris de cochons. La batterie entre en scène puis une guitare, légerement saturée en même temps que la voix. Les effets sont innombrables. Les couplets sont de beaucoup moins bonne qualité que dans Dogs ou Sheep. Mais ce riff qui ne s'arrête que pour faire place à un autre encore meilleur nous transcende vers les abîmes de la société capitaliste, très largement critiqué. Puis le solo final, qui résonne comme un chant du cygne.
Sheep enfin, son début si doux et si fin, ses bêlements. De loin les paroles les plus marquantes de l'album. Le génie musical dans cette chanson résidant en la voix qui se fond avec la guitare sans que l'on s'en aperçoive. Une ligne de basse impressionnante, des ruptures omniprésentes, le synthé qui nous fait planer, Pink Floyd est à son sommet. On parodie discrètement un psaume dans une écriture talentueuse et le tout est résumé par cette phrase: You better stay home and do as you’re told, get out of the road if you want to grow old.
Animals, c'est La ferme des animaux, en inversé. Les cochons sont les méchants capitalistes, les chiens sont ceux qui veulent à tout prix ,en dehors de toute morale, se faire une place. Et les moutons ce sont les autres. Un brin caricatural ? Sans doute. Un brin idéaliste ? Aussi. Marxiste ? Surement pas. L'amour est la seule solution apportée même si elle semble très spécifique à Waters. Les autres étant enfermés dans un pessimisme inarrêtable. Animals serait-elle une oeuvre chrétienne ?
Dark Side était un cri, Wish you were here une larme, Animals est un dernier espoir qui s'éteindra pour former un album terrible de pessimisme et de cynisme : The Wall.