Big Fish Theory
7.1
Big Fish Theory

Album de Vince Staples (2017)

Depuis ses première mixtapes, il était évident que Vince Staples avait ce "truc", où en un couplet, le mec te donnait clairement l'impression qu'il finirait par sortir un classique. Il suffit d'écouter Nate , Hive ou 65 Hunnid pour que la versatilité et le talent teinté de non-chalance du gars te saute à la gueule. Le problème, c'est que jusqu'à ce Big Fish Theory, chaque projet lassait un goût d'inachevé dans la bouche: mixtapes faites à la vite, un Summertime '06 trop inégal mais bourré de fulgurances, et enfin Prima Donna, EP prometteur mais trop court, qui voyait le natif de Long Beach s'accoquinait avec James Blake, pointure de l'électro de fragile.


Et puis, enfin, la déflagration. Crabs In a Bucket (produit par JUSTIN FUCKING VERNON) et son beat tout droit sorti d'un mix de Burial, suivi de Big Fish, qui ferait presque figure de reprise de YG sous acide, bref, en deux morceaux, il est évident que ce Big Fish Theory est loin d'être un album de rap comme les autres, mais quelque chose de beaucoup plus intéressant. Le mot qui revient dans la plupart des interviews entourant la promo du bouzin, c'est "afrofuturisme", et c'est sans doute là que réside la clé de l'album, tant celui-ci semble 10 ans en avance sur son temps. La plupart des morceaux présents ici ne devraient pas marcher, tant ils relèvent souvent d'une espèce de fusion monstrueuse de genres que tout oppose: G-Funk, Indus, EDM/trap grand public, PC Music... Seulement, dieu que ça marche bien.


Là où son voisin californien Kendrick (qu'on retrouve d'ailleurs sur le monstrueux Yeah Right au côté de Flume et Sophie (!)) s'époumonait pour rattraper la production dense dans TPAB, Vince glisse sur chaque morceau avec une aisance presque énervante, sans se laisser dépasser par les développements monstrueux des beats qui l'entourent. Et pour cause, difficile d'envisager un meilleur écrin pour de pareilles prouesses lyriques: loin des chroniques adolescentes de Summertime '06, Big Fish Theory y appose le même point de vue désabusé sur l'Amérique tout entière, souvent violent, mais toujours pertinent. Et cette véritable réinvention de ce que peut être le rap au XXIème siècle (ce qu'aurait dû être Yeezus en somme) prend alors un tout autre sens, comme une porte ouverte vers un océan d'autres possibles dans lequel Vince Staples prend enfin sa place de gros poisson au sommet de la chaîne alimentaire.


9.5/10

TarkovskiNautique
9

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs albums de 2017

Créée

le 23 juin 2017

Critique lue 1.1K fois

22 j'aime

2 commentaires

Critique lue 1.1K fois

22
2

D'autres avis sur Big Fish Theory

Big Fish Theory
noarr
8

Critique de Big Fish Theory par noarr

Je crois que tout le monde est unanime, il s'agit de l'album de l'été, voire de l'année. Si le Hell can wait était déjà une belle pièce, on est avec Big Fish Theory un cran au dessus. Même...

le 31 août 2017

4 j'aime

Big Fish Theory
rapchroniques
8

Encore un très bon projet de Vince

J'avais déjà abordé Summertime '06 de Vince Staples en disant tout le bien que j'en pensais. Il sort son deuxième album en 2017 et on peut parler de grand changement de direction, chose qu'il fera...

le 17 nov. 2021

3 j'aime

Big Fish Theory
Mahaut_Barré
7

Vince Staples dans le grand bain

Fidèle à lui-même, Vince Staples aime jouer avec les sonorités et les compositions futuristes. Big Fish Theory ne ressemble à aucun autre album. Ses instrumentales sont rythmées, saturées,...

le 4 févr. 2018

2 j'aime

Du même critique

Big Fish Theory
TarkovskiNautique
9

Comme un poisson dans l'eau

Depuis ses première mixtapes, il était évident que Vince Staples avait ce "truc", où en un couplet, le mec te donnait clairement l'impression qu'il finirait par sortir un classique. Il suffit...

le 23 juin 2017

22 j'aime

2

Toni Erdmann
TarkovskiNautique
9

Extension du domaine de l'amour

L'histoire du XXIème siècle est marquée par une série de grandes injustices : les 0,25% de Jacques Cheminade aux dernières élections présidentielles, le carton rouge de Zidane en finale de la...

le 24 mai 2016

22 j'aime

3

Madvillainy
TarkovskiNautique
10

Comment j'ai appris à ne plus m'en faire et à aimer le sampling

Mes tops 10 ont beau fluctuer au gré de mes découvertes et de mes humeurs, depuis le début, un album reste inamovible tout en haut du classement: Madvillainy. Aux côtés des Donuts du regretté Dilla,...

le 30 juil. 2017

18 j'aime

1