A la fin des années 70, Ozzy est au fond du trou. Son renvoi de Black Sabbath pour démotivation et abus de substances douteuses l'a précipité dans une crise existentielle de plusieurs mois, le voyant enfermé dans sa chambre d'hôtel remplis de cartons de pizzas et autres bouteilles vides. Il aurait pu rester ainsi s'il n'avait du de l'argent au producteur de son ancien groupe, qui le presse donc pour qu'il rebondisse au plus vite. La persistance de la fille de ce producteur, Sharon Alden, fera qu'Ozzy se décidera à reformer un groupe, et au passage, le fera tomber amoureux d'elle.
Après quelques semaines de recherche, les musiciens qui donneront un nouvel élan à la carrière d'Ozzy sont trouvés. Lee Kerlsake pour la batterie, et Bob Daisley pour la basse sont débauchés d'Uriah Heep tandis que le guitariste Randy Rhoads vient de Quiet Riot. Les compositions de l'album à venir seront principalement le fruit de Osbourne et Rhoads, entre lesquels une grande complicité germera rapidement.
Et c'est donc en 1980, qui sera également l'année du premier album du Sab Mark II, que parait ce "Blizzard Of Ozz", concis mais plein de moments forts, plus de la moitié devenant au fil du temps des classiques toujours joués live (il faut dire qu'Ozzy n'est malheureusement pas du genre à varier les setlists malgré sa conséquente discographie).
Cela démarre avec "I Don't Know", et sa montée en puissance durant 10 secondes, avant que la guitare explose les enceintes. Le riff est simple mais fait le job, la basse bourdonne, la batterie étant peut-être trop en retrait. Mais le plaisir est là dès le départ, avec Ozzy nous disant, en gros, qu'il faut arrêter de lui poser des questions existentielles, qu'il en sait rien, et que tout ce qu'il sait, il l'a appris tout seul, et qu'on devrait mener la vie qu'on veut.
Le second titre est encore meilleur, et Ozzy nous invite cordialement à embarquer à bord du "Crazy Train". La qualité est décidément au rendez-vous, et cette fois, le groupe nous invite à arrêter d'attiser la haine, que l'amour vaut le coût malgré tout, que même si la guerre froide laissera des traces durables,il faut aller de l'avant.
Les paroles sont relativement engagées, sans être non plus hypra profondes. Elles se retiennent et se chantent bien, c'est là l'essentiel.
La troisième piste sera une ballade. Et à partir de maintenant, chaque album d'Ozzy en contiendra au moins une. La qualité ne sera pas forcément dominante au fil des titres, mais pour celui qui nous intéresse ici, on peut dire qu'elle est présente. "Goodbye To Romance" est une chanson faisant évidement référence à son passé avec Black Sabbath, peut-être légèrement remanié pour obtenir le joli rôle ("'Cause I have to take this chance, goodbye to friends and to romance..."). La mélodie te fait bercer de droite à gauche et possède un fort goût de nostalgie bienvenue, la chanson défile sans temps mort.
"Dee" est anecdotique, dure à peine une minute et voit Randy Rhoads faire un petit solo de guitare acoustique. Dee étant le nom de sa mère, on comprend que celle-ci ait été touchée de l'attention. Nous, moins.
"Suicide Solution" a valu un gros procès au groupe, diverses associations accusant Ozzy de pousser au suicide ses auditeurs (le fameux "Shoot ! Shoot ! Shoot" durant le solo). Ce qui, comme le déclarera plus tard Dee Snider de Twisted Sister, serait totalement contre productif. En réalité, les paroles se veulent être un hommage à Bon Scott, récemment mort étouffé dans son vomis après avoir trop picolé. En dehors des paroles, la musique, hard-rock à souhait, demeure l'un des meilleurs titres de l'album, et l'un des plus symbolique de toute la discographie.
"Mr Crowley" démarre par une inquiétante intro au synthé, imitant les orgues d'église pour ce que l'on peut imaginer être une messe noire. Référence est faite à Aleister Crowley, célèbre occultiste anglais. Autre gros classique du metal, la guitare y est une fois de plus magistrale (quel solo !).
Premier léger faux pas du l'album, "No Bone Movies" se veut grivoix et obséquieux. Il est marrant, il s'écoute facilement, mais au milieu des monuments sus-cités, il devient anecdotique. C'est pas très grave.
Un chef d'oeuvre un peu méséstimé arrive en antépénultième, avec ce magnifique "Revelation (Mother Earth)" oú Ozzy tire déjà la sonnette d'alarme écologique : notre planète se meurt et nous n'en avons rien à faire. Le chant plaintif, caractéristique des premiers albums de Sabbath est de retour, et sans pour autant dire que cette chanson aurait eu sa place sur l'un d'eux, on ne peut nier sa grosse qualité. Et ce final, ce solo de piano... La guitare... On en redemande...
... Mais on ne sera pas exaucé sur le dernier titre de ce Blizzard Of Ozz. "Steal Away The Night" est de la qualité de "No Bone Movies", pas mauvaise, mais trop en deça des autres chansons ici présentées qu'il apparait bien fade. Le chant se veut pourtant bien optimiste, mais la mélodie trop simpliste contribue au fait que la mayonnaise ne prend pas cette fois. Au vu du reste de l'album, et de ce qui allait arriver, on n'en tient pas rigueur !
Premier extrait de la carrière solo d'Ozzy, cet album est donc un franc succès. Sharon a donc eu raison de pousser le Madman au cul pour revenir sur le devant de la scène.