C'est assez fort de voir la différence entre les critiques de l'époque et l'opinion générale aujourd'hui sur Drukqs : en 2001, un album médiocre sans aucune cohésion, innovant en rien ; en 2016, un album de génie parmi les meilleurs d'Aphex Twin.
Mais même avec cette retournée de chemise complète, cet album reste un mystère pour pas mal, et le fait de savoir que cet album aurait été "sorti dans la précipitation, après avoir oublié un lecteur MP3 rempli de chansons inédites, et pour pouvoir sortir de Warp Records" - aussi étrange que cela soit - aide pas vraiment à apprécier à sa juste valeur.
Eh bien, après avoir écouté maintes fois ce gigantesque mastodonte (1 heure 40 !!), je peux vous le dire : la cohésion générale est une des choses les plus uniques de cet album. Ca a l'air d'un best-of, ou plutôt d'une simple collection de tracks, sans véritable début ou fin, ou de fil conducteur tout le long du milieu, mais pourtant c'est bel et bien un album avec un a, avec un son unique, une ambiance propre à lui-même, et une logique dans la disposition des tracks (en général 1 composition piano, puis 1 chef d'oeuvre d'IDM, avec des interludes entre parfois).
Les chansons elles-mêmes, sont Aphex Twin à son apogée.
Il y a des pièces minimalistes, avec une desquelles l'album commence en CD1, histoire de dire "ahah vous vous attendiez à du gros son qui tue, vous êtes mignon vous", mais qui laisse entrevoir une bonne partie de l'ambiance de cet album, avec des mélodies mélancoliques et magnifiques (qui ne connaît pas Avril 14th parmi les fans d'Afx ?).
De temps en temps, y a des interludes, qui servent en fait à une chose : établir cet album comme une aventure musicale, plutôt qu'une simple collection de musiques, comme je vois trop souvent dans ces fameux reviews de 2001.
Dans le lot sortent au final Gwety Mernans et Gwarek2, des espèces d'OVNI musicaux plutôt "avant-garde" : l'un est une composition ambient avec une basse qui tourne autour de vous tout du long, et la deuxième... est un peu difficile à décrire, mais en gros cherchez musique concrète sur Wikipédia et vous aurez une idée de ce que c'est. C'est un peu flippant et brutal, et donc ça représente parfaitement l'autre partie de l'ambiance de Drukqs.
Et évidemment, il y a les highlights. Les tracks d'IDM qui durent au moins plus de 4 minutes (certaines atteignent plus de 8 minutes !), rigole sournoisement à la simple idée de "couplets" et "refrains", et très clairement, des démos techniques de tout ce que Aphex Twin peut faire. Ce sont des chef d'oeuvres de leur genre, qui arrivent à contribuer à toutes les qualités que je citais précédemment, et pour revenir à l'idée "d'aventure musicale", ne cesse de se renouveler minute après minute. Limite de l'IDM "progressif", mais avec une structure complètement libre, où Aphex Twin fait ce qu'il veut, quand il veut, et tout ce que vous avez à faire c'est vous prendre ces beats stridents et supersoniques dans la gueule et adorer chaque seconde.
C'est aussi les chansons "standards" d'Aphex Twin, ce qui laisse à penser pour certains critiques de l'époque que tout le reste n'est que du remplissage de CD pour faire un double album prétentieux et voler notre pognon.
Mais clairement, non. Drukqs est une bombe, et certes certaines pièces ne sont pas assez travaillées et ne durent pas assez longtemps, mais pour moi c'est la seule chose qui m'empêche de mettre un parfait 10/10 plutôt qu'un sublime 9/10. Enfin, objectivement, parce que si vous me demandez mon avis il vaut tout d'un 10 à mes yeux :p