« Electric warrior » est un album majeur dans l’histoire du rock des années 70, au même titre que le « Ziggy stardust » de David Bowie et le « Sergeant Pepper’s... » des Beatles. Je vous le dis comme ça, d’entrée et tout de go, au risque d’en surprendre quelques uns.
Vous qui avez vu le film « Billy Elliot », vous avez encore dans les oreilles la bande son ; elle est composée à 80% de chansons de T-Rex (dont le magnifique « Cosmic dancer » ici présent).
T-Rex, c’est principalement un type au destin à la fois fabuleux et tragique : Marc Bolan, auteur-compositeur-interprête-guitariste et homme de scène.
Fan de BOb DyLAN (son pseudonyme est un hommage: même si certains fâcheux puristes le contestent), Marc Feld entre en musique sur ses traces, imprégné d’un certain Folk qu’il conservera comme base tout au long de sa carrière. A la création de son groupe Tyrannosaurus Rex (heureusement rapidement contracté en T-Rex), Marc Bolan branche ce Folk là sur des amplis saturés, tout en préservant sa simplicité et sa richesse mélodique. Mais surtout, il le fait basculer dans un style scénique complètement débridé : attitudes équivoques, androgynes et libérées, maquillage outrancier, cheveux en crinière, fringues délirantes, boas en plumes, platform shoes ... Le Glam Rock est né. Bolan l’a créé.
Nous sommes en 1971, T-Rex a un succès phénoménal en Angleterre et l’album « Electric warrior » sort, produit par un certain Tony Visconti.
C’est le sommet de la carrière du groupe. Les mélodies sont splendides et touchantes. La voix fragile, légèrement métallique de Marc Bolan ne nous lâche pas une seconde. Hormis l’imparable hit « Get it on », on reste scotché par l’émotion à l’écoute de « Girl », de « Cosmic dancer », on sautille de plaisir sous le « Mambo sun » et « The motivator », on plane avec « Planet queen » et « Life’s a gas » pour finalement exploser d’excitation sous les coups du précurseur « Rip off », sauvage et surprenante apothéose.
Aucune faiblesse dans cet album : les morceaux s’enchaînent sans longueurs, sincères, spontanés. C’est tout simplement époustouflant.
Maintenant, avant que vous vous précipitiez chez votre disquaire pour vous procurer ce bijou qui manquait à votre discothèque, je voudrais terminer mon histoire.
La brèche du Glam Rock étant ouverte, de nombreux artistes vont s’y engouffrer. David Bowie, jeune Mod en costume sur mesures est fasciné par Marc Bolan. Il réussit à se produire en première partie de T-Rex et devient un ami très proche de son idole. Professionnellement, il puise sans retenue dans la Marc Bolan attitude, lui subtilise son producteur Tony Visconti, adopte son style, le pousse au paroxysme...et devient son principal concurrent.
Bolan n’a ni le talent médiatique, ni le culot opportuniste de Bowie : l’élève efface le maître avec notamment l’épopée « Ziggy Stardust » (album et tournées mémorables) où le splendide morceau « Lady stardust » raconte Marc Bolan, ce qu’il a été et ce qu’il deviendra, c’est à dire presque plus rien.
Marc Bolan sombre dans l’oubli. Il a un fils (Rolan Bolan) en 1975 avec la chanteuse Gloria Jones . Il voyage, il s’intéresse à la peinture, en particulier à Magritte, dont un de ses tableaux intitulé « 16 septembre » (qui représente un arbre dans le contre-jour d’un croissant de lune) le fascine au point qu’il en parle dans son journal intime.
En 1977, il se voit confier la présentation d’une série de shows télévisés.
Le 9 septembre, on l’y voit en duo avec David Bowie (leur amitié a survécu, malgré tout).
Le 15 septembre, Marc et Gloria passent la soirée dans un club à Londres.
Le 16 septembre au petit matin brumeux, la Mini 1275GT- conduite par Gloria - s’encastre dans un arbre (dans le contre-jour d'un croissant de lune ?).
Marc Bolan est tué sur le coup.
Il avait presque tout juste 30 ans.