"On me dit que j'ai changé, je réponds : je suis le même en mieux"
C'est certain, Burbigo a fait son petit bonhomme de chemin. Depuis " Dîn rimes & intérim", sa révélation au Rap Contenders, ses freestyles pour l'Entourage et désormais les projets solos.
Il est même intéressant de constater le changement physique : fini le rabza tout keus "détèr' crâne rasé tel un militaire à 30 piges". Aujourd'hui Deen a pris de la corpulence, s'est fait pousser la barbe et les cheveux poivre et sel.
Une maturation physique qui n'est pas forcément en lien avec son travail musical. Clairement, "Fin d'après minuit" est très différent de "Inception". Cette différence est avant tout artistique : autres ambiances musicales, autres rythmiques, autres placements. Ce deuxième EP est beaucoup plus posé et lent dans le style, ce qui accompagne les principales thématiques du projet : chill, fumette et potos, ou à l'inverse, contemplation et solitude.
"Inception" était d'avantage dans l'introspection, ce qui n'empêchait pas à Deen de proposer son lot de tracks égotrip et "hydroponiques". Toutefois, le Mc révèle une réelle qualité d'écriture ("Debout à l'aube") et un sens de la mesure ("Rimeur à gages"). Qualités conservées dans ce deuxième EP, mais avec l'originalité et la surprise en moins...
Disons que "Inception" est un projet qui peut nous parler, car beaucoup de morceaux abordent des thématiques larges dans lesquelles on peut se situer. "Fin d'après minuit" est d'avantage centré sur le rappeur, sur sa qualité de vie, ses hobbies. Ce qui finit par devenir répétitif. Et le plus significatif est que ces sujets d'écriture font l'objet de l'ensemble des textes grattés par le rappeur pour l'album de L'Entourage (sorti quelques mois plus tard), ce qui peut témoigner d'un manque d'inspiration...
La tracklist tient clairement la route, malgré quelques inégalités qui étaient non présentes sur "Inception".
"Suis-je", premier extrait du projet, annonce la couleur de l'évolution grâce à une lenteur de flow travaillée sur une boucle de piano mélancolique. Même constat sur le deuxième extrait, "J'résiste" : chronique d'un périple urbain solitaire, sur un refrain de Nemir en mode spleen.
Si les ambiances posées de Cehashi et Drum Dreamers donne la tonalité globale de l'EP, Deen refait appel à Dance pour un des meilleurs morceaux du projet :"Métropolis" est clairement le track qui se rapproche le plus de l'univers d'"Inception".
Petit détour par sa terre natale du Sud, pour lâcher le morceau délire et portant le nom de l'EP : "Fin d'après minuit" bénéficie d'une prod' efficace de Just Music.
Mais le meilleur morceau reste celui d'ouverture. "Age d'or" est une sorte de ré-évaluation du rappeur et de son crew dans le paysage hip-hop français, entre egotrip et clins d'oeil aux "aînés". D'autre part ce track bénéficie de la meilleure prod' du projet, signée par le très talentueux En'Zoo, le beatmaker de Nemir.
"Fin d'après minuit" reste un EP de qualité, bien produit, bien exécuté. Moins percutant que "Inception", ce projet démontre toutefois que Deen évolue, expérimente, se bonifie dans sa technique. Cette dernière est certes moins nerveuse qu'auparavant, mais elle s'explique par le changement de tonalité.
Quoiqu'il en soit Deen Burbigo est le Mc le plus intéressant de son collectif. A suivre de très prêt.