Mais où vont-ils chercher tout ça ? De leurs origines américaines qui les fait être plus royalistes que le roi, les passionnant pour quelques gueules cassées de la culture underground US (Hank Williams, Woody Guthrie ou Jack Kerouac auquel ils empruntent leurs noms). Du parcours musical propre à chacun qui voit se côtoyer un harmoniciste qui a le blues dans le coeur, une amoureuse de Cabaret Allemand des années 20, un guitariste folk, un autre manouche et un contrebassiste élevé à la new wave. Au premier abord pourtant, la musique de Moriarty semble parfaitement cerné : une tendance couleur sépia pour un blues folk des origines avec armatures acoustiques. Leur musique naturelle jouée sans électricité ou presque peut égayer un feu de camps ou rendre inquiétant une ruelle sombre (Jimmy). Mais à y regarder de plus près, les contours sont moins évidents. Que pensez de la guitare orientale sur Animals can't laugh ?
Du texte japonais de *Tagono*Ura* ? Moriarty invente son propre langage, sa propre temporalité et, comme le suggère le nom de leur site, son propre pays. Le terme de "cabinet de curiosités" circule pas mal à leur sujet. Et il y a de idée. Un endroit où se mélangent quantité d'éléments hétéroclites, où l'on s'émerveille d'objets bizarres et où l'on est fasciné par quelques monstruosités. Pas de foetus en bocaux mais une musique perpétuellement forte en goûts ; l'exact contraire d'un monde aseptisé et pasteurisé. Poétiques et réalistes (private lily raconte la vraie histoire d'une pauvre fille qui s'engage dans l'armée), les textes dessinent aussi leur propre univers littéraire et augmente encore une émotion déjà énorme (cotton flower est la dernière lettre à sa bien-aimée d'un soldat mourant au champ de bataille). Moriarty navigue surtout à contre-courant du toujours + formaté et fade et retrouve ainsi le chemin des sentiments essentiels et carnés.