Peut-on mélanger l'immaturité, l'ignorance et le génie ?

Le deuxième album de Lil Pump donne tout de suite la couleur avec un titre et une pochette très clairs : on abandonne l'école, on jette les livres et les connaissances qui vont avec. Un partie pris qui va évidemment déplaire aux bien-pensants pour qui la musique doit servir un intérêt plus grand. Alors oui effectivement si on s'attarde sur les paroles de l'oeuvre on comprend vite qu'on a pas affaire à un nouveau Shakespeare. La totalité de l'album peut se résumer en quelques lyrics "Yes, I’m hella ignorant, I don’t give a fuck” / “Learned how to sell crack before I learned to read a book”, voire même simplement avec le titre de son feat avec Lil Uzi Vert : “Multi Millionaire”. Jusqu'ici pas grand chose de bien nouveau dans cet univers, bien que le fait d'assumer (revendiquer?) une certaine ignorance n'est pas chose si courante chez les rappeurs. On passera donc sur l'aspect intellectuel de l'oeuvre, les engagements politiques sont inexistants, les références culturelles ultra rares, on ne jugera pas un album de Lil Pump de la même manière qu'un album de Kendrick Lamar ou de Kerry James.
Allons plutôt regarder où notre protagoniste est doué, et il y a des choses à dire de ce côté là. Des instrumentales de qualité, un flow des plus précis, des clips complètement barrés et une capacité rare à mettre en valeur les featurings. La fraîcheur de Kanye West et Lil Wayne sur leur morceau en est une preuve, la performance de Quavo (bien meilleure que ce qu'il nous a pondu ces derniers mois en solo) en est une autre. L'album impressionne parfois par sa technique, parfois par son second degré, souvent par ses beats percutants.
La jeunesse et l'insouciance de Pump lui permet de faire des choses différentes, beaucoup de spontanéité et une ligne de basse qui nous invite à bouger en permanence. Les puristes le fustigent pour le manque de profondeur de ses textes mais rappelons-nous que le mouvement hip-hop est avant tout une musique de rassemblement, portée sur la danse, bien avant de devenir politique. Finalement n'est-ce pas là un bel hommage à l'essence même du rap ?