Le deuxième film de Saeed Roustayi, Just 6.5, curieusement traduit par La Loi de Téhéran, est un thriller social qui contraste autant avec les codes du thriller qu'avec ceux de la plupart des films iraniens.
On assiste dès le début de l'œuvre à une course poursuite qui nous permet de situer l'histoire dans un contexte spatio-temporelle. On y découvre un Téhéran désert où la poussière se mêle à l'étroitesse des ruelles pour nous plonger dans une ambiance angoissante. Le spectateur est pris à la gorge d'emblée, ébahi devant la dureté des premières scènes. Saeed Roustayi nous confronte à la misère en enchaînant des plans séquences admirables. La première demi-heure suffit à comprendre qu'on a affaire à un réalisateur brillant qui a un paquet de choses à nous raconter.
Le scénario reprend un schéma assez classique mais prend de la hauteur grâce à la complexité des personnages rencontrés tout au long de l'histoire, chacun défendant sa propre vision de la justice, de la liberté, de la vie. Loin du manichéisme habituel des blockbusters américain, les protagonistes ont tous leur part d'ombre et de lumière. Samad, un narco-détective fidèle à lui-même va consacrer toute son énergie à lutter contre le fléau du crack. Il est un homme de valeur qui rêve de justice mais qui va vite se rendre compte qu'il s'agit là d'un concept subjectif, il entrera dans une phase de dissonance cognitive inévitable qui amènera une attitude ambigüe à l'égard de son entourage. Le contre exemple est représenté par Naser Khakzad, le Pablo Escobar Iranien, interprété par un Navid Mohammadzadeh absolument bouleversant. On lui attribue les pires horreurs sans les voir à l'écran. Il va peu à peu prendre une place centrale dans le récit et aura l'occasion de défendre sa vision du monde, évidemment opposée à celle de Samad sur de nombreux points.
Etant meilleurs ennemis, ils vont pourtant se retrouver sur les thématiques centrales de l'œuvre de Saeed Roustayi. Le réalisateur critique la répression aveugle de l'Etat Iranien et l'existence de la peine capitale qui pousse Naser à jouer gros puisqu'il risque autant pour 30 grammes que pour 30 kilos. On voit dans les deux protagonistes une réelle empathie pour les plus faibles, et en particulier pour les enfants qui représentent l'avenir et l'espoir d'un monde meilleur.
C'est donc de cet improbable intervalle que le propos central du film surgit, soulevant des interrogations profondes sur l'émancipation, la liberté, la dignité. Just 6.5 est un drame social qui parle de l'Iran et de la condition humaine, mais il prouve aussi que l'on peut faire un vrai thriller sans montrer le moindre meurtre à l'écran (ou presque).

MedeFnr
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le 24 oct. 2020

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