Étrangement, Jeanne Cherhal se réclame de Véronique Sanson. Pourtant, c'est Sheller qu'on entend dans la composition et les arrangements. Un piano pop aux résonances classiques s'appuyant sur une basse bien présente (J'ai faim), un éclectisme musical (Finistère), une écriture poétique.
Hybridation
D'accord, on y voit parfois la patte d'une Sanson dans la légèreté de la voix (Bingo) et les thèmes nettement plus féminins. Disons que J. est l'enfant caché (mais pas tant que ça) de ces deux grands monstres, et tant d'autres, de la chanson française forte et assumée. Cette même chanson française intransigeante tant du point de vue musical que de celui de l'écriture, tant du point de vue de la technique que de l'émotion. On pourrait remonter jusqu'à un Brassens tant certains de ses textes ne font pas de ronds de jambes (Cheval de Feu), ou un Michel Berger pour d'autres plus revendicatifs (Noxolo). Tels des palimpsestes, la trame des chansons évoquent sans jamais en faire une référence explicite ou pesante et cela grâce à une production moderne laissant une grande liberté à l'interprétation.
Histoire d'incarnation
Histoire de J. est l'album le plus pointu de Jeanne Cherhal. Le style a perdu en légèreté ce qu'il a gagné en maturité. Un album qui se présente assez dense, lourd d'héritage mais qui n'écrase pas son auteur. On choisira l'image que l'on voudra ; la prise de flambeau, l'éclosion du papillon... Ce qui est sûr, c'est qu'après avoir arpenté son propre chemin Jeanne est devenue le parfait avatar de la chanson française.