Ma première rencontre avec Frank Zappa se déroula lors de la découverte de Peaches En Regalia, morceau d'ouverture de cet album. Tout de suite me vint un plaisir inexplicable. Cette impression de foisonnement musical, de brutalité, de génie, de perpétuelle évolution... Il fallait que j'écoute l'album.
Si le reste de Hot Rats n'a pas le génie de son morceau d'ouverture, il n'en demeure pas moins un impressionnant chef d’œuvre. Dédale musical, empruntant des chemins escarpés et carrément variés (jazz et rock principalement quand même) il invente quelque chose, une signature, LA signature Zappa.
Les Gumbo Variations sont sans doute le sommet de folie de l'album, 16 minutes d'un thème minimaliste carrément obsédant, seul repère au cœur d'une avalanche d'impros, de "bordel organisé" (ce qu'il réitérera sur Grand Wazoo), de virtuosité instrumentale. Cependant pour moi les meilleurs morceaux de l'album sont les plus courts : Peaches En Regalia bien sûr mais également It Must Be A Camel, voluptueux et intriguant, et Little Umbrellas, à l'harmonie branlante.
Il est des artistes qui se foutent de tout, quel que soit les formules musicales, les parti pris, les harmonies qu'ils utiliseront, ça sonnera toujours super bien. Zappa est de ceux-là. A l'écoute de cet album on est en droit de se demander qui aurait osé, surtout à l'époque, tel avant-gardisme musical. A l'époque le Jazz Fusion n'est encore qu'à ses balbutiements et maître Zappa fout une claque à toute une génération en montrant qu'il n y a même pas besoin d'expérimenter. Il laisse direct un chef d’œuvre, et récidivera avec ses deux autres grands opus du fusion : Grand Wazoo et Waka/Jawaka.
Enfin bref, il est toujours difficile de parler d'un album de Zappa car tout ceci est tellement génial qu'on a l'impression de parler dans le vide. Un album de Zappa ça s'écoute et ça se vit, toujours. Même si je trouve Hot Rats inférieur au sublime Grand Wazoo (malheureusement moins connu), il reste un sommet de la carrière de Zappa, un des plus grands musiciens du XXème siècle !