Bizarrement je n’avais jamais écouté l’intégralité de ce premier opus, étant focalisé à 100 % sur la période Bruce Dickinson et ne voulant connement sortir que rarement de ma zone de confort habituelle.
Sorti en 1980, après cinq années d’errance du groupe dans l’underground londonien à côtoyer des punks écervelés, le premier album éponyme de Maiden se caractérise par une maturité étonnante et ce, malgré la faible production du disque et l’instabilité du line-up pas encore légendaire. Court, tranchant dans le vif (9 titres pour 40 minutes, sur la réédition de 1998 avec Sanctuary en plus des 8 morceaux initiaux), l’album ne livre quasiment que des tubes et rien est à jeter.
Démarrant en trombe avec Prowler et Sanctuary, diablement efficaces et taillés pour les stations de radio (on vient de me rappeler qu’ils ne passerons pas souvent sur les ondes…), montrant que le groupe en a dans les tripes et veut se faire entendre, l’album ne s’arrête pourtant pas là et nous envoie à la face un nouveau classique, Remember Tomorrow, épique à souhait, avant un autre single, Running Free, entraînant comme jamais, limite punk (on est dans l’époque). Vient ensuite une autre épopée musicale, Phantom of the Opera, culte à en crever et reprise nombre de fois en live, l’instrumental dantesque Transylvania, aussi culte qu’un Coast to Coast des Scorpions, puis Strange World, semi-ballade inconnue aux radars, la faute à la pelleté de classiques qui l’entourent, qui est pourtant fichtrement bonne et odieusement sous-cotée. Charlotte the Harlot, écrite par Dave Murray et racontant les aventures d’une prostituée qu’il a connu pendant l’enfance, est incontournable et virtuose, l’album se clôture sur la chanson-titre qui donne son nom à la fois à l’album et au groupe, très bon mais ne se voulant pas plus ambitieux que le reste du disque.
Un premier album globalement réussi malgré une production reflétant l’underground dans lequel évoluait le groupe d’alors (ce qui rajoute au charme du disque en ce qui me concerne !), au son légèrement punk mais purement heavy metal dans l’âme, avec même quelques avant-goûts de speed/thrash avant l’heure, le tout derrière une pochette un peu hilarante mais ajoutant au capital sympathie pour ce groupe pas encore devenu un monstre de son genre, la première d’une longue série montrant la mascotte culte de la formation : Eddie.
S’il n’est pas au niveau de son successeur qui va tout défoncer sur son passage, Paul Di’Anno donne un certain charme à l’album grâce à sa voix, celle-ci plus proche de la scène punk que la scène metal, ce qui fait que le disque est unique, autant dans la discographie du groupe que dans le genre en général, un peu hybride, le cul entre deux chaises.
S’il présente quelques répétitions et se mord un peu la queue (les singles présentés se ressemblent tous et peuvent être interchangeables), l’album compense par une énergie dense et limite dansante, sonorité étonnante et singulière, due au jeu des deux guitares à la fois solistes et rythmiques (ici Murray et Stratton) et aux talents de composition et de musicien de Steve Harris, qui structure tous les titres autour de sa basse en plus de donner le rythme comme un bassiste lambda et jouant avec comme un guitar-hero (un "bass-hero" ?), offrant au monde un avant-goût du son unique qui caractérisera Iron Maiden dans le futur.