Une pochette fort peu attirante - considéré la renommée du groupe et l'année de sortie - mais des teasers très alléchants ; que vaut au final le cru 2013 du duo grec, pionnier du genre dans sa région et même membre de la seconde vague du black metal ?
ΚΑΤΑ ΤΟΝ ΔΑΙΜΟΝΑ ΕΑΥΤΟΥ (ctrl-c ctrl-v, béni sois-tu) se veut multiculturel, regroupant le patrimoine mythologique de nombreuses civilisations. Concrètement, cela implique l'utilisation de multiples langages (comme l'avestique sur l'excellent "Ahura Mazdā-Aŋra Mainiuu") ainsi que quelques (rares) instruments folks. Hélas, si l'érudition mise en avant est appréciable, les passages en anglais dans les paroles sont parfois d'une stupidité affligeante. Dommage.
Instrumentalement d'ailleurs, le groupe ne se réinvente pas vraiment. On retrouve les grandes lignes d'Aealo, l'album précédent. Un mélange bien ficelé de black metal, de death mélodique, de chants clairs d'inspiration religieuse et d'une bonne dose de rythmique tribale.
Sur le plan structurel, la galette est à la fois égale... et inégale. Egale parce que plate d'une certaine façon, le combo ayant du mal à sortir de son mid-tempo souvent guerrier, parfois groovy. Inégale parce qu'après une introduction en puissance ("In Yumen-Xibalba", transcendant) et quelques excellents morceaux, l'album semble s'effondrer à son adaptation d'un morceau traditionnel roumain ("Cine Iubeşte Şi Lasă"), qui soulève pourtant la curiosité à son commencement.
Passé ce petit raté, l'album reprends le style qu'il avait commencé à établir, mais les gimmicks reviennent trop souvent et l'on commence à se demander s'il se terminera sur cette répétition. Heureusement, "Русалка" et l'excellent "Ahura Mazdā-Aŋra Mainiuu" redonnent vie à la fin d'album, qui se termine hélas de manière assez convenue sur un morceau final lent et peu intéressant ("Χ Ξ Σ", le nombre de la bête en VO).
A noter que les grecs ont quelque part tourné cette répétitivité en concept, à la manière de la forme sonate de la musique classique (premier mouvement des symphonies) : "Κατά Τον Δαίμονα Εαυτού", le quatrième morceau, est en tout point une réecriture de "In Yumen-Xibalba", thème de l'album, déplacé sur une autre gamme, comme dans la forme sonate (ou presque). Ce procédé semble à nouveau utilisé par la suite, sur "Gilgameš", piste signant en quelques sorte une relancée de la galette après un milieu d'album un peu fade.
Les plus :
+ ce syncrétisme mythologique et culturel
+ ce thème qui revient et se déforme
+ ce chant clair quasi-liturgique
+ ce feeling global plutôt unique
Les moins :
- ces paroles en anglais souvent stupides
- cet aspect répétitif et trop égal
- ces soli parfois de trop
A écouter :
"In Yumen-Xibalba"
"Ahura Mazdā-Aŋra Mainiuu"
"Grandis Spiritus Diavolos"