Love at First Sting
7.3
Love at First Sting

Album de Scorpions (1984)

Le gros problème de SCORPIONS reste le fait que, sur chaque album, d'excellentes chansons en côtoient d'autres un tantinet moins bonnes ("Taken By Force" en est le parfait exemple). Aucun n'échappe à ce traitement, même le fameux "Blackout" adulé par une masse imposante de gens qui voient en cet opus l'accomplissement ultime des teutons. "Blackout" était très bon, certes, mais il souffrait d'un cruel manque d'inspiration : des chansons comme "Can't Live Without You" ou "Arizona" sont d'une faiblesse assez incroyable. Si on regarde bien, l'inspiration a vaguement disparue à partir de "Animal Magnetism". Heureusement que le groupe en avait encore sous le pieds.

Bref, revenons au sujet principal : "Love At First Sting". Cet album marque (avec "Crazy World") l'apogée commercial du groupe, la faute à deux titres connus mondialement : l'hymne Hard Rock "Rock You Like A Hurricane" et la ballade "Still Loving You". La faute ? Oui, parce que ça devient très lourd d'entendre parler de SCORPIONS qu'avec ces deux titres, surtout quand on sait que ce ne sont pas les meilleurs, loin de là ! "Still Loving You" est une des chansons les plus sur-estimés existantes. SCORPIONS est particulièrement doué pour les ballades, c'est sûr et certain mais "Still Loving You" est d'un ennui mortel. On tombe allègrement dans la soupe : les paroles ne me dérangent pas plus que ça en temps normal mais là, c'est trop. C'est encore plus cul-cul que "Always Somewhere", c'est pour dire. Et quand on pense que les membres du combo trompaient souvent leurs femmes avec des groupies hystériques... ça laisse dubitatif. L'air n'est pourtant pas désagréable, mais la suite tourne en rond sans arrêt. Même Klaus Meine ne laisse pas rêveur, idem pour le solo.
Je suis un peu de mauvaise foi en disant que "Rock You Like A Hurricane" est d'une qualité inférieure. C'est tout de même LA chanson pour les stades. Ce riff caractéristique, ces soli du feu de Dieu, cette ambiance boite de nuit allemande, ce break torride... Que du bon ! Non en fait, le seul réel problème de cette cette composition, c'est le culte qui lui est voué. On en entends parler partout... victime de son succès quoi.

"Love At First Sting" marque aussi l'incorporation d’éléments Hard FM dans la musique de SCORPIONS. Ce n'est pas une mauvaise choix, bien au contraire mais cet album montre que SCORPIONS n'est pas vraiment très à l'aise avec ce nouveau registre qui s'ouvre à lui. "As Soon As The Good Times Roll" par exemple, manque de force, surtout au niveau des riffs qui sont carrément faiblards. Mais le solo est là pour contrebalancer le tout. Et c'est un peu comme ça dans toutes les chansons de l'album : il y a toujours un petit quelque chose qui sauve la musique. Dans "Bad Boys Running Wild", c'est les passages mélodiques dans les couplets qui envoient un soupçon de beauté au résultat final (et qui, au passage, sauvent un refrain bien gringalet). "Crossfire" est une chanson souvent oubliée quand on parle de "Love At First Sting". En forme de marche guerrière, sa montée en puissance est un petit plaisir. Tout comme cette beauté qui transpire dans les guitares et le refrain (le côté désespérant est superbe). L'émotion atteint son paroxysme avec les soli, qui donnent un côté féerique à la composition. Une petite bizarrerie d'une grande classe.

Malheureusement, les surprises ne sont pas légion. Des brûlots Hard tel que "Coming Home" et "The Same Thrill", qui rappelle les heures de "Blackout" sont très bons mais ne sont pas d'une grande originalité. "Coming Home" est dotée d'une introduction magnifique (ces "Dream we're going out on stage, it feels like" chantés par Klaus Meine, wow...) qui débouche sur une accélération bien sentie où Rudolf Schenker et Matthias Jabs s'en donne à coeur joie à coups de riffs et soli assassins. Le tempo est élevé, et même si Hermann Rarebell n'est pas réputé pour sa grande finesse, il assure comme un bûcheron. "The Same Thrill" est d'une même acabit que sa grande soeur. Elle rappelle même ACCEPT première période à certains moments. "The Same Thrill" vaut surtout pour ses parties de chant endiablées (les choeurs s'adaptent d'ailleurs très bien à la chanson, "Like A Rock N' Roll") et son monstrueux solo qui envoie méchamment du lourd. La fin rappelle la folie destructive de morceau éponyme "Blackout".

Je ne comprendrais jamais l'engouement qui entoure "Big City Nights". C'est sans doute la chanson la plus faible de l'album. Le riff n'est pas intéressant, c'est du FM de quarantième zone... on sent parfaitement que SCORPIONS voulait plaire aux radios ici. Pour une de ses rares fois, Klaus Meine est vraiment très énervant avec ses pitoyables montées sur le refrain. Un titre catastrophique, à oublier. Ce n'est pas le cas du superbe "I'm Leaving You" qui revêt encore une fois cette beauté si spéciale. C'est un bon Hard mélodique comme il le faut, rempli de feeling surtout sur les couplets. Le solo vaut aussi le détour.

"Love At First Sting" n'est pas le meilleur album de SCORPIONS. On sent que le groupe se cherche encore dans l'exploration de ce nouveau registre (attention tout de même, ce n'est pas le même Hard FM qu'un BON JOVI ou qu'un JOURNEY). C'est aseptisé FM mais la hargne de "Blackout" refait surface à plusieurs moments. Le groupe assure encore une fois, même si le manque d'idée est un léger problème. Si la paire Schenker/Jabs assure toujours aussi bien, Klaus Meine perd un peu de son charisme au profit d'une voix plus stable et puissante.

Un album qui a au moins le mérite d'avoir envoyer SCORPIONS dans les sphère du Rock ! L'album suivant, "Savage Amusement" sera bien meilleur.

Chansons favorites : "I'm Leaving You", "Coming Home", "The Same Thrill", "Crossfire".

(critique publiée anciennement sous mon ancien pseudonyme : KingKilling sur le site Nightfall)
Nikki
7
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le 2 févr. 2014

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