Fallait bien quelqu'un pour le faire. Et pour le faire correctement, rendre un truc pas dégeu pour les p'tits gars. Et comme pour beaucoup de choses, un seul en avait le cran: Serge Gainsbourg. Mieux: il réussit à faire d'un album anti-familial, anti-conformisme et anti-pudeur... un des disques français les plus connus des années 80, la meilleure vente de sa carrière, et surtout les meilleures chansons de Gainsbarre (si on compte pas l'album "Mauvaises nouvelles des étoiles"). Dans sa période "funky années 80", c'est son bon album, "you're under arrest" étant une merde reconnue à l'unanimité. Et faut bien le dire: ils ont plus vieillis que ses albums reggae... Alors, le plaisir "love on the beat", d'accord, mais de plaisir nostalgique.
Déjà, y' a pas d'intro en douceur. Au contraire, le plus hard en premier. "Love on the beat" est un poème pornographique, la plus longue chanson de la carrière de Serge. On voit bien qu'il a voulu viser gros, installer une ambiance insoutenable d'érotique. Mais le défi est à moitié réussi. Certes, le texte est très beau et le principe de la musique est cool. Cependant, Gainsbourg chante parfois trop tôt pour ses parties vocales (concrètement, y' a que la dernière strophe qui est en parfait accord) et la musique est trop répétitive, sans compter des solos au saxo qui sont pas terribles et la participation de Bambou assez navrante. Beaucoup mieux, "Sorry Angel". Là, Gainsbourg transcende son genre musical et parvient à imposer une atmosphère à la fois céleste et romantique. C'est une des rares chansons où sa tendresse véritable transparait. Et c'est forcément émouvant. "Hmmm, Hmmm Hmmm", la deuxième et dernière chanson à ne pas parler de sexe... effectivement, hmmm, hmmm. C'est un délire dans lequel il faut rentrer... autant la musique est sympa, le refrain est carrément excellent, autant les couplets... What ? Il a fait un bien meilleur hommage aux écrivains avec "Rock'in chair" pour Birkin. Des fois, il exagère vraiment : (...) Rimbaud/ celui-là il devait former un beau/ Couple avec l'autre là chais plus... Oh" sérieusement ? "Kiss Me Hardy" est une des chansons du chanteur où l'on entend le moins sa voix. Et ce qu'il dit n'est pas franchement intéressant. Par contre, la musique est vraiment bonne, et le solo de saxo est cette fois à la hauteur. "No Comment" est un plaisir coupable pour moi. Ce qu'il dit, c'est vraiment de la déconne, mais j'apprécie quand même. La musique a le problème de la répétition monotone (surtout sur 5 minutes), mais le rôle du clavier est génial sur ce morceau. "I'm the Boy" est le chef d’œuvre de l'album. Les paroles n'ont aucun problèmes, la voix est touchante, la musique à jamais impossible à démoder. C'est intelligent, unique par son sujet et audacieusement dénonciateur. Elle joue beaucoup sur ma note de 7. Parce que juste après, on passe au plus gros navet de l'album, et sans doute l'un des plus conséquents de sa carrière. "Harley david son of a bitch" (c'est marrant d'ailleurs de s'apercevoir à quel point Gainsbourg a rejoué, détourné, parodié cette chanson composée pour Bardot, pendant tous les stades de sa carrière ! A fouiller...) est incroyablement nul, surtout en sachant le talent du mec. C'est bien simple, je comprends pas comment on puisse composer ça et le rendre en se disant "ouais gros, c'est trop bien, tout le monde va kiffer"... Pour achever le disque, il se rattrape avec "Lemon Incest", l'une de ses chansons les plus dérangeantes et une des plus provocatrices jamais composées, dû au duo avec sa propre fille. Je trouve ce coup absolument énorme, et il va enfoncer le clou avec son clip (très puéril) et son film (un peu moins puéril). Mais c'est un coup de pied dans la fourmilière qui est jubilatoire ! Et la chanson en elle-même, bien que je trouve dommage que Gainsbourg ai répété 3 FOIS le même texte (c'est pas la première fois d’ailleurs, et j'aime pas quand il utilise ce procédé alors qu'il pourrait apporter encore d'autres choses dans ses propos !), est magnifique. Je trouve également que l'utilisation d'une mélodie de Chopin est justifié, car vraiment très réinterprété.
Alors, qu'en penser au final... c'est avant tout un bien coupable, et ça dès le concept ça allait être évident. La pochette met tout de suite dans le bain, très bien réalisée même (apparemment, ils ont dû enlaidir un peu Gainsbourg, il parait qu'il était sublime en travesti !). Mais il n'empêche qu'à côté de quelques bonnes chansons et deux chefs d’œuvres, il y a un paquet de merdes. L' audace est tout de même, comme d'habitude, à saluer. On n'auras plus de nouveaux "Love on the beat", en tout cas pas de la part d'un artiste aussi populaire.