Très certainement le meilleur album des Fatals Picards, il s'agit, en tout cas de leur plus connu. Et surtout d'une pépite incroyable. 8 ans après sa sorti, il continue d'être écoutable n'importe quand, n'importe comment, c'est un véritable plaisir pour les oreilles entre rire et critique de la société.
Les Fatals Picards font ainsi parti de cette bande d'artiste capable d'avoir un regard acerbe sur la société et de pointer, en même temps, du doigt, sous couvert de grands rires, les pires défauts du système. Comme Coluche pour les spectacles humoristiques ou Gotlib pour la BD (certains me disent que maintenant Charlie Hebdo étant aimé par le plus grand nombre, ça devient également une référence politiquement correct).
Composé de dix-sept titres, l'album est divisé en deux grande catégorie : les chansons engagés et les chansons purement drôles.
Ainsi Bernard Lavilliers n'a pas d'autre but que de rire gentiment du célèbre artiste tout en lui rendant hommage. Ce-dernier apparaît d'ailleurs dans le clip, montrant qu'il avait bien compris la blague et la douceur derrière. Il faut dire que le morceau est très réussi derrière.
Djembé Man est plus agaçant à mon sens au niveau musical et ne repose que sur l'humour de son texte qui, malheureusement, semble lourd sur la longueur, bien dommage. Notons cependant une des meilleures blagues de l'album avec « changer sa roue, man ».
Moi je vis chez Amélie est une belle satyre de l'univers du célèbre film Amélie Poulain. Bien écrit, bien chanté, le rythme est particulièrement séduisant. Comme souvent avec les Fatals Picards, on finit par chante à tue-tête les paroles tellement c'est entrainant et amusant. Et là, musicalement c'est très bon.
Cure Toujours peut être vu comme un brin agressif envers le mouvement gothique, mais je pense qu'on peut dire que ce n'est que du second degré qui joue des sonorités proches des Cures. Bien écrit et séduisant, là encore, on chante les refrains avant de s'en rendre compte.
A côté de ça, on a donc quelques titres engagés. Parfois un peu, parfois beaucoup. Si certaines, comme Commandante revendique, avec un son résolument rock, la volonté d'engagement politique, de critique et révolutionnaire du groupe, la majorité sont très drôle. Cela dit, au milieu de l'album, Commandante rappelle un peu le sérieux qui se cache sous les rires des Fatals Picards. Et musicalement ça reste très bon.
Un des morceaux les plus connus du groupe, la Sécurité de l'Emploi a un constat bien triste du travail de professeur, soulignant la difficulté à être dans le public. Drôle à en souhait, ça met bien en lumière la difficulté de cette profession avec un rythme très entrainant. On retrouve un peu cette façon de faire avec Et puis merde je vote à Droite, qui est bien amusant et est une critique du groupe envers les valeurs des électeurs de droite. Musicalement c'est bon enfant, comme les paroles semblent l'être mais cache en réalité une profonde critique.
Pour autant, bien que de gauche, le groupe assume d'être d'une gauche morte, d'une gauche qui n'existe plus. Ainsi, touchant au possible « mon père était tellement de gauche » se veut être une critique du communiste qui ne cache pas non plus la désillusion de la perte du père, un thème fort, émotionnel, avec un relent politique. Notons qu'après avoir bien flingué l'URSS et les électeurs de gauche (tout le monde en prend pour son grade), le groupe reconnaît que « mon père était tellement de gauche que lorsqu'il est parti la Gauche est partie avec lui ». En fallait-il plus pour que les Fatals, assumant d'être de gauche, montre, par la même occasion, qu'ils se désolidarisés totalement de la politique actuels et que tous les électeurs sont, pour eux, aussi cons les uns que les autres ?
Le beauf français est d'ailleurs un sujet de prédilection du groupe. Sous forme d'une ballade qui rentre vite en tête, Au Mariage de Kevin et de ma Soeur fait un triste constat d'une partie des français. Raciste, macho, violent, trompeur, tant d'éléments qui amènent de la tristesse dans le ton du narrateur qui est dégouté de voir autant de bêtise humaine.
Dansant, Monter le Pantalon rappelle un peu que le groupe est capable d'être groovy. Sous couvert humoristique là encore on a une belle critique de la France profonde que les Fatals Picards détestent tant. Le tout avec un clin d'oeil à Tomber la chemise.
Le racisme se retrouve aussi dans Je viens d'ici où cette fois c'est le nationalisme corse qui est vivement critiqué, le tout avec beaucoup de cliché quand même, montrant que le groupe ne renoncera jamais à son célèbre humour.
Française des Jeux est troublant au possible et désespérant. L'histoire d'une pauvre femme, sans le sou, dans la misère et dans une famille sans amour, médiocre, où elle même ne fait aucun effort et claque tout son argent dans les jeux à gratter n'empêche pas d'avoir de la pitié pour elle. On est dans du Zola, c'est bien écrit et sous couverts d'humour noir, les Fatals Picards montrent encore qu'ils peuvent être un groupe incroyablement touchant.
Les Dictateurs est un morceau plus reggae basé sur des jeux de mots sur les dictateurs. Une manière aussi de rappeler leur grand nombre et les horreurs qu'ils ont commis.
Dans un autre registre, Seul et Célibataire est un morceau rock, empli de bonne phrase, de comparaison sur l'état dans lequel on est après une rupture amoureuse. Un peu personnel mais extrêmement drôle, ça reste un très bon moment.
Partenaire Particulier est une reprise rock du célèbre titre du groupe éponyme. Même si ça balance, on se dit qu'un autre titre d'un autre groupe aurait pu être un meilleur choix.
On se demandait (Où sont les Pistes Introuvables) termine (presque) l'album avec une très longue piste de 27 minutes. La première partie est un morceau où le groupe demande au public d'être à fond dans les concerts pour être réinvités par les organisateurs de concerts. En rigolant ainsi, le groupe parle cependant bien de la difficulté de la condition de groupe amateur (ce qui n'est évidemment pas leur cas) et l'utilité, réelle, d'un public qui est motivé. On a ensuite quelques blagues racontées par les membres du groupe. Puis un morceau de cymbale. Entrecoupés de blague on a quelques titres bonus comme l'excellent titre humoristique Punk à Chien, rapide et drôle. Puis le Skate sur un père qui veut faire du skate avec son fils. Là encore, c'est drôle, simple et efficace. On oubliera aussi pas la Country, très drôle sur ce genre musical si connu.
La version rééditée de l'album contient une piste en moins, la dernière : Public et en remplacement, l'Amour à la Française en quatrième piste. On se rappelle très bien de ce morceau puisqu'il a valut un bel échec de la France à l'Eurovision et le sentiment que le groupe était des vendus. Le groupe s'amuse à chanter en français avec un accent anglais mignon. Malheureusement, bien que facile d'accès, il manque la touche Fatals Picards : pas de folie ni d'humour.
Pamplemousse Mécanique est donc un album très réussi. Entrainant, entêtant, séducteur au possible, les titres se gravent avec une folle rapidité dans l'oreille de l'auditeur. Le mélange ska/punk/reggae/rock est réussi au possible et offre une véritable diversité musicale. L'écriture est très bonne, drôle, marquant, mais cachant de véritables problèmes, on ne peut que être fans des textes.
Les Fatals Picards sont définitivement un groupe extrêmement bon, un des plus grands talents de la scène française et il serait plus que dommageable de ne se rappeler d'eux que suite à leur prestation médiocre à l'Eurovision. Car non, l'Amour à la Française, ce n'est pas ça, les Fatals Picards.