« Prism », dans son édition deluxe, est vendu avec quelques graines non-identifiées, que vous êtes invités à planter et regarder pousser. En voilà, une bien jolie métaphore pour nous dire que miss Perry a grandi ! Nous sommes donc en présence d’un album de la maturité, reflet de l’évolution artistique et du récent divorce de la dame. D’où son air grave et épuré sur la pochette, qui tranche avec le sourire salace qu’elle affichait sur ces deux précédents albums. Ça, c’est pour le concept, la promesse produit.
La réalité est quelque peu différente, et le clip du lead single (« Roar »), dans lequel Katy pose une manucure rose sur un éléphant, aurait dû nous mettre la puce à l’oreille. Car « Prism » ne rugit pas, il ronronne, déclinant paresseusement les recettes ayant fait leurs preuves dans les classements mondiaux (mention spéciale pour ce délire en mode Daft Punk et complètement hors-sujet sur « International Smile » et « Love Me »). Comme nous n’avons pas tout à fait affaire à des amateurs, la mayonnaise prend plutôt bien, du moins sur la première moitié de l’album : « Roar » a tout de l’hymne à reprendre dans Glee, « Birthday » et « Walking On Air » (prononcez « Wokinoné ») sont délicieusement eurodance 90s, « This is How We Do » sent bon la bierre estampillée Ke$ha. De quoi faire de « Prism » le parfait album pour la prochaine boum de votre petit cousin. Il est même possible de trouver un véritable charme à « Legendary Lovers » qui, à coup de cithare synthétique, surfe sur la vague électro-orientale lancée par Selena Gomez. Sans être radicalement transporté, on écoute le tout avec plaisir.
Puis vient la piste neuf. Le moteur s’embourbe, le lion rugissant connaît l’extinction de voix. Les titres tombent dans une niaiserie gluante, un gloubiboulga indigeste, qui ennuie tout d’abord avant d’irriter tout à fait. La palme revient très étrangement à « Double Rainbow », pourtant composé par la talentueuse Sia (à qui l’on doit des trucs chouettes comme le « Diamonds » de Rihanna), qui signe là son plus gros raté depuis bien longtemps. Il ne faudra pas compter, pour redresser la barre, sur les trois titres bonus de l’édition deluxe, dont l’achat se justifie uniquement par le mystère sur la nature des graines que nous évoquions plus haut.
Au final, « Prism » laisse en bouche un goût doux-amer, avec une seconde partie intégralement jetable et une première partie n’arrivant pas à se hisser à la hauteur des tubes précédents de la chanteuse. Pas de « Hot’N Cold » dans cette galette, donc, ni de « E.T. » ou de « Last Friday Night ». « Prism » est un « Teenage Dream » nettement moins fun (elle est là, la prétendue maturité) et donc nettement moins séduisant.
On nous promettait un rai de lumière, un jet de couleurs, mais le dernier album de Katy Perry n’a d’aveuglant que sa pochette holographique, et du prisme, que son caractère lisse et transparent.