J'aime bien les vinyles. Comme une sorte de vieux souvenir d'une époque révolue où la musique s'écoutait rituellement. Changer de face toutes les 20 minutes, impossibilité de mettre pause ou de sauter une chanson instantanément... Comme ça, ça parait chiant. Mais les contraintes ont parfois du bon. Et dans le cas des vinyles, à l'ère du écouté/jeté, ça fait même carrément du bien de devoir se poser pour pouvoir réellement écouter un album.
En plus ça a quand même plus de gueule qu'un carré sur iTunes.
Quant à mon père, puisqu'on parle de vieux souvenirs d'une époque révolue, il possédait, en plus de goûts divers, variés, mais pas vraiment abondants (il devait écouter régulièrement une dizaine de groupe, pas plus), une collection de ces reliques plutôt conséquente, à force de temps et de patience.
Et parmi ceux-là, "The Wall". Celui d'époque. Acheté à la sortie. Avec la pochette sans nom, l'intérieur fourré de dessins hallucinés, et encore les deux rondelles à l'intérieur. Le sortir, c'était comme retrouver le pot dans lequel Jésus pissait ado pour le pape. Avec le faisceau de lumière, les choeurs angéliques, et tout.
C'était beau à voir.
Mais ça s'est arrêté là. Tout rituel que c'était, son écoute s'est finalement révélée décevante. Le temps n'épargne pas les oeuvres cultes, et le son, que j'attendais comme le retour du plus pur analogique, celui des 70's, taillé comme un diamant dans le ciel, est finalement tout décrépi, rabougri, inaudible. Accablé par les décennies de poussières. Mais pas d'étoile, plutôt du fond de la cave.
Et ça résume assez bien mon expérience avec cet album. On me l'avait vendu comme le chef d'oeuvre du plus grand groupe du monde. L'album le plus ambitieux jamais écrit. On était presque prêt à pardonner à Waters d'avoir tué son groupe, si ça signifiait donner vie à cet album. Et bien sûr, une attente pareille n'aura eu pour effet que de me faire croire qu'un très bon album n'était en fait qu'une coquille vide, un diamant en plastique...
Mais le temps fera son affaire, et m'aura permis de considérer cet album pour ce qu'il est : de très bonnes chansons ("The Trial" notamment, souvent oubliée), desservie par un concept trop important pour seulement servir la musique, au lieu de l'inverse.
Finalement, le vinyle aura explosé de contenir une musique trop ambitieuse, comme la musique aura implosé par son concept.