A une époque où tous les albums importants évoquent systématiquement des musiques déjà entendues, prouvant que l'ère du grand recyclage est définitivement arrivée, "Turn Blue" presente l'avantage non négligeable de ne guère sonner que comme un disque des Black Keys - détournés vers le Middle of the Road, certes - et de nous procurer un plaisir franc, celui de ne pas avoir à chercher des références à cette musique légère, ludique, gentiment séduisante. Des chansons blues/soul bien trempées dans la soupe pop, avec des mélodies accrocheuses, rapidement mémorisables, illuminées ça et là de solos de guitare flamboyants mais pertinents, et, partout, une délicieuse impression de plaisir pris par les musiciens autant que dispensé à l'auditeur : voilà aujourd'hui comment on peut résumer un album des Black Keys. Les fans des premières heures du groupe pourront bien pester et rager, le reste de l'humanité ni verra probablement que du bien... si ce n'est que, indéniablement, "Turn Blue" est un disque qui descend en pente douce, depuis l'ouverture parfaite de "Weight Of Love", certainement l'un des grands morceaux de l'année, jusqu'à une conclusion assez minable ("Gotta Get Away") en rock stonien léthargique. [Critique écrite en 2014]