With Us Until You're Dead par FrankNF
En janvier dernier, à l'occasion de la venue de BirdPen à Bordeaux, Dave Pen me confiait que le prochain album d'Archive promettait d'être "psychédélique". D'abord perplexe, je me suis concentré sur les premiers teasers balancés sur leur site Internet. "Bof, pas de quoi casser trois pattes à un canard", me suis-je dit. 'Violently' et les quelques extraits de leur septième album studio eurent du mal à me convaincre. Seulement voilà, le charme d'Archive réside justement dans la cohérence, non pas de leur effet de surprise, mais de la production et de l'insertion parfaite de chaque titre entre eux. La première écoute de l'album complet, une semaine avant sa sortie, laissait présager quelque chose de grandiose.
En effet, si 'With us until you're dead' n'est pas l'album du siècle, il n'en reste pas moins excellent. Moins élaboré que 'Controlling Crowds', moins pessimiste également mais plus épuré, l'album emprunte des chemins qui brassent de manière subtile les genres qui ont fait d'Archive ce qu'ils sont aujourd'hui : les 12 morceaux évoluent dans une sorte de pop-rock-électro-orchestrale, délaissant le rock progressif et les élans lyriques de 15-20 minutes pour aller à l'essentiel. Servi par des voix qui repoussent leurs limites, Berrier et Pen en tête, l'album atteint des strates jusqu'ici inexplorées. Un album d'Archive se vit donc véritablement comme une aventure, une expérience. Chaque morceau prend forme et cohérence dans le grand tout qui l'accompagne. Griffiths précise à ce propos que chaque morceau pris indépendamment les uns de autres n'a plus grand intérêt. À ce niveau-là, 'With Us Until You're Dead' est dans la droite lignée des productions précédentes. Aucun répit n'est accordé. Le seul silence que le disque observe se situe entre 'Damage' et 'Rise', les deux dernières pistes de l'album. Une expérience, disais-je. Une expérience sonore où chacun trouve sa place, où les morceaux se font échos, s'interpénètrent. Un disque haut en couleur, donc, à la fois fidèle aux intentions d'Archive et en marge de leur discographie. Car le collectif emmené par Daniel Griffiths et Darius Keeler se moque éperdument de ne pas plaire, ni même de passer à la radio. Il évolue au gré des émotions et de l'instant présent.
De ce cru 2012 on retiendra essentiellement deux choses : les percussions de Smiley, enivrantes et folles, voire même épileptiques ('Conflict', 'Violently', ‘Twisting’), et la puissance des quatre voix qui portent l'album. À noter au passage la première collaboration avec Holly Martin, jeune chanteuse britannique dont le timbre de voix contraste avec la douceur de celui de Maria Q. De la même manière, Berrier et Pen apportent chacun une couleur différente, l'un par sa puissance ('Wiped Out', 'Twisting') l'autre par sa retenue et la délicatesse de sa voix de tête ('Interlace', 'Conflict' et surtout 'Rise'). C'est en effet fort de son expérience avec son groupe BirdPen que Dave Pen se permet cet exercice.
Alors certes, tout n'est pas parfait et force est d'admettre que les morceaux dits "atmosphériques" de 15 minutes ont tendance à nous manquer. Mais qu'à cela ne tienne, 'Calm Now', 'Things Going Down' et 'Rise' remplissent leur office en imposant des moments de grâce parmi ce chaos et ce fatras de violence et de sons psychés, un peu à la manière dont s'enchaînaient 'Seamless' et 'Finding it so hard' sur 'You All Look The Same To Me'.
M'est avis que leurs performances lives sauront rendre hommage comme il se doit à ce disque. J'en frissonne d'avance... Mais quoi qu'il arrive, I'll be with them until I'm dead.