Une femme sous cape traîne deux zombies en laisse, et manie le sabre avec précision.
La première page de cette courte introduction, permet de s’échapper un instant. Mais le répit est bref : Dexter intime à Rick d’emmener son groupe hors de la prison. L’affrontement est évité par un brusque retour à leur lugubre réalité : l’attaque massive de rôdeurs échappés de couloirs inexplorés mobilise l’attention de tous. C’est l’occasion d’une très belle page, de seize cases pour seize portraits des tireurs et de leurs cibles. Puis la jeune femme impressionnante de l’introduction, parvenue aux grilles de l’enceinte, sauve la vie d’un ami d’Hershel qu’elle a suivi. De l’autre côté, six cases (armes en action, et portraits de zombies) nous ramènent dans l’action pour voir Rick profiter de la confusion et descendre Dexter. Irrémédiablement, le personnage s’assombrit. C’est d’ailleurs confirmé par un superbe portrait pleine page, sombre et contrasté, où le phylactère presque vide, bien trop grand pour une réponse murmurée dans un souffle à l’ombre d’une cellule, dit
l’impuissance et la perte de repères du héros.
Les dangers se multiplient et Rick se retrouve dépassé par ce qu’il doit gérer. Tous le sont. Confrontés à l’inimaginable depuis si longtemps qu’ils survivent, tous gèrent ce qu’ils peuvent.
Par contraste, la première conversation de Michonne, hors de sa cape et sans le sabre, esquisse un pragmatisme assumé. Le reste prend le temps de laisser la vie s’installer un peu plus, et quelques plans illustrent l’avancée du potager, d’autres narrent les confidences des enfants. Bientôt, ils prennent conscience qu’ils sont là pour longtemps, qu’il va falloir tenter de reconstruire quelque chose. Ils prennent conscience de la nécessité de poser les bases de nouvelles règles, d’un nouveau fonctionnement. Un comité, sensé soulager Rick, est nommé.
Et Rick vient s’expliquer :
Les choses ont changé. Le monde a changé. Et nous allons devoir
changer avec lui,
la tirade s’étend sur quelques pages. Tandis que les rôdeurs s’entassent aux grillages, Rick leur confirme qu’ils sont enfermés, impuissants à voir le monde au-delà. Dans le périmètre sécurisant de la prison, le gros plan puissant de rage explose sur une double page :
C’est nous les morts-vivants !
Le constat est amer.
Tous commencent de comprendre combien
les circonstances rongent leur humanité,
qu’il n’y a pas de salut possible autre que la survie. L’environnement qui les contient les condamne. Le scénario fait la part belle aux questionnements dans ce volume, c’est appréciable. C’est ce qui donne au genre son intérêt. L’univers s’étoffe et la série commence d’accrocher puissamment le lecteur. La dérive de Rick, ses soubresauts d’humeur sur une voie sombre, l’incompréhension grandissante, et l’apparition intrigante de Michonne, y sont pour beaucoup.