Urban continue la publication des récits fondamentaux de Batman avec A Death in the Family, quasi inédit en français (il y a une souscription chez Semic il y a une dizaine d'années). Il s'agit d'un arc issu de Batman 426-429, par Jim Starlin (scénario) et Jim Aparo (dessin) en 1988-1989. Il s'agissait de la première fois que les lecteurs ont été mis à contribution par le biais d'un numéro de téléphone pour influencer la fin de l'arc.
Depuis que Dick Grayson a pris son indépendance vis-à-vis de Bruce Wayne et oeuvre désormais sous le nom de Nightwing, le rôle de Robin a été repris par Jason Todd, beaucoup plus tête brûlée que Dick et impopulaire parmi les lecteurs. Quand l'arc commence, Robin est décidément très perturbé par des soucis personnels, au point que Batman lui demande de prendre du repos. En passant près de son ancien immeuble (il est orphelin), une ancienne voisine lui confie un carton de souvenirs appartenant à ses parents. Jason découvre que sa mère n'est pas sa mère biologique. En quête de sa mère (parmi 3 candidates), sa route croise celle du Joker, poursuivi par Batman ... Rencontre fatale !
L'histoire paraît un peu cousue de fil blanc, avec un nouveau twist pour épargner le Joker puisqu'il devient l'ambassadeur à l'ONU de l'Iran. Le parti pris politique est particulièrement crapuleux, à mon humble avis (même si l'Iran n'est certes pas un pays à la bonne réputation diplomatique).Le récit est cependant limpide et le dessin classique mais efficace. Les couvertures de Mike Mignola sont superbes. En tout cas, DC n'a pas fait dans la demi-mesure pour enterrer Jason Todd, victime d'une mort particulièrement atroce et qui replaçait définitivement le Joker dans la catégorie des psychopathes peu de temps après the Killing Joke.
L'album est complété par le crossover Teen Titans / Batman A Lonely Place of Dying : Tim Drake, un adolescent de 13 ans, qui a découvert par déduction les identités civiles de Nightwing et Batman, tente de persuader Dick de reprendre le rôle de Robin auprès de Batman, beaucoup plus brutal et moins attentif à sa sécurité personnelle depuis la mort de Jason. Las, Batman rejette leur aide tandis que Double Face refait des siennes. Si cet arc marque les débuts de Tim Drake, il ne deviendra officiellement Robin que l'année suivante. Là aussi, l'histoire est bien dessinée (Jim Aparo et George Perez, 2 vieux routiers) et se laisse suivre sans déplaisir, malgré un premier degré constant. On sent tout le poids de Dennis O'Neil et Neal Adams, remis en question par la nouvelle vague de dessinateurs / auteurs qui formeront Image.
Le récit en lui-même n'a rien d'exceptionnel, mais c'est sa postérité qui en fait un tournant capital dans l'histoire de Batman : la mort de Jason Todd est le pire échec de Batman et l'un de ses plus grands traumatismes (avec son dos brisé par Bane dans Knightfall). Jason Todd est depuis revenu à la vie, particulièrement vindicatif, en 2006 (dans l'arc Under the Red Hood, adapté en film d'animation). Tim Drake s'est imposé là où Jason a échoué, puisqu'il est resté Robin jusqu'en 2009 (avant de céder sa place à Damian) et il a eu les honneurs d'une série. Dans un crossover à paraître prochainement en français, Scott Snyder met en scène le retour du Joker ("disparu" depuis le premier épisode de Detective Comics New 52) dans Death of the Family. Ce n'est sans doute pas innocent ...