De la baston métaphysique !
Manga d'une noirceur rarement égalée, mais aussi histoire d'amour tragique, réflexion sur le mal présent en chaque homme, rire sardonique craché à la face du destin que l'on s'écrit, Berserk est une longue baston métaphysique face à l'absurdité du monde.
Comme tout bon conteur, Kentaro Miura sait que pour décrire des ténèbres immenses, il faut d'abord la confronter à une lumière aveuglante. Ainsi Gatsu, le personnage principal, passe certes la majorité de son temps à étriper des monstres, mais il a aussi été un petit garçon à la recherche d'affection paternelle, un ami se dévouant corps et âme au rêve de l'autre, un amant refusant d'avouer ses sentiments puis un soutien dévoué aux autres.
Le plus impressionnant dans Berserk, ce n'est ni la qualité du dessin, pourtant sublime et baroque, ni les sentiments puissants dans lesquels il plonge ses lecteurs, ni l'imagination délirante en matière de monstres et de glauque, mais la cohérence narrative de l'ensemble.
Si l'âge d'or de la jeunesse avec Grifith et Casca est évidemment le moment le plus fort et le plus beau par sa dimension tragique reserrée (grandeur et décadence), la suite ressemble furieusement à une reprise à plus grande échelle du même cycle de vie : errance solitaire, dénuée de sens, pendant laquelle le héros pense mourir de sa propre noirceur, puis rencontre avec de nouveaux compagnons qui, de fardeaux, deviennent peu à peu la raison d'être du héros. L'abnégation de Gatsu va bien plus loin cette fois, et on sent dans sa recherche celle de l'auteur : comment peut-on vivre dans ce monde post-apocalyptique ?