C'est à travers un trait épuré mais précis que Craig Thompson nous livre l'autobiographie très touchante de son enfance jusqu'à son entrée dans l'âge adulte. Tout en noir et blanc et au fusain (ou un équivalant), son livre s'étale sur par moins de 600 pages découpées en plusieurs chapitre qui nous dévoilent l'histoire de son premier amour. Autour de ce récit, on y découvre la personnalité introvertie de l'auteur, sa jeunesse peu facile et la communauté très chrétienne de sa région du Wisconsin dans laquelle s'encre fortement l'éducation de ses parents.
Cette BD est avant tout une histoire d'amour, qui réussie sans difficulté à écarter toute niaiseries habituelles grâce à la justesse des sentiments, dépeints de manière très belle à travers les astuces graphiques et les métaphores. Car Thompson construit un récit qui s'articule autour des réflexions de son lui-adolescent, empruntes de .la profondeur qu'on leurs accorde à cet âge et qui deviennent fondamentales avec le recul. On observe ainsi la construction du jeune adulte Craig, à travers son expérience de la vie et la confrontation avec ses certitudes d'enfants : la relation aux autres (à la "masse"), les sentiments amoureux, la religion, la famille, l'avenir.. Mais ces thèmes, que je catégorise de manière un peu scolaire, son dilués dans une histoire véritablement autobiographique, pas vraiment originale voir presque banale, mais d'autant plus touchante car crédible, familière, et sublimée par la mise en scène et le dessin de l'auteur.
Car c'est là tout l'intérêt de la bande dessinée : illustrer, mettre en scène, rendre expressif ce qui l'est difficilement par l'écrit, et Thompson le fait particulièrement bien. Son style est simple et élégant, parfois proche de l'esquisse et parfois plus du cartoon, mais toujours très expressif et efficace. Sans aller jusqu'à bouleverser les codes, il joue régulièrement avec la mise en page de ses planches pour rendre son récit fluide et vivant, et prend plaisir à dépasser la simple illustration pour représenter de manière plus fantaisiste certaine émotions.
Ce fut donc avec un réel plaisir que j'ai découvert Craig Thompson, un auteur que je connaissais jusqu'alors que de nom. Si je n'ai pas mis plus de 8 à Blankets, c'est uniquement parce que j'ai personnellement ressentie une petite retombée du plaisir à partir du long épilogue, et après l'excellente dernière partie du récit. Mon interprétation :
peut être est-ce dû au sentiment un peu triste de la fin de l'histoire entre Raina et Craig (c'est mon coté sensible..) et son retour aux réalités; et plus surement au fait que j'ai arrêté ma lecture juste avant l'épilogue (la fatigue) la veille, ce qui m'a laissé une impression un peu mélancolique. N'hésitez pas à donner votre avis, de toute façon.
Mais j'ai aimé le trait de Thompson et j'ai aimé son talent d'auteur : je recommande évidemment vivement Blankets, et j'attend avec impatience de tomber sur ses autres BD.