Bleach
6.4
Bleach

Manga de Tite Kubo (2001)

[Aucun spoil, seules quelques grandes lignes du scénario sont évoquées dans cette critique. Bonne lecture !]

Gros blockbuster du shônen actuel, « Bleach » a, à son commencement en août 2001, rapidement suscité l’engouement des adeptes du genre. Un univers original, des combats au sabre, il faut reconnaître que ça avait une sacrée gueule ! Tout ceci lui a permis d’atteindre assez rapidement le haut de l’échelle. Cependant, son long parcours a par la suite suivi une trajectoire en dent de scie, partageant ainsi les avis à son sujet. Revenons plus précisément sur les éléments caractéristiques de son succès et ceux ayant pu pousser un bon nombre de lecteurs à l’abandonner.

L’histoire de « Bleach » débute au Japon, dans la ville fictive de Karakura. On y retrouve Ichigo Kurosaki, jeune lycéen un tantinet rebelle doté du don particulier de pouvoir entendre et toucher l’âme des morts. C’est un soir que sa vie va radicalement basculer lorsque Rukia Kuchiki, une shinigami (signifiant « dieu de la mort »), fait irruption dans sa chambre, attirée par une grande pression spirituelle. Celle-ci, surprise qu’Ichigo puisse la voir, lui confie être à la recherche d’un hollow (âme errante consumée par le désespoir ou la rancune et désormais guidée par son insatiable faim d’âmes humaines). Ce hollow étant venu s’en prendre à la famille d’Ichigo, Rukia est donc venue accomplir son devoir de shinigami, à savoir protéger le monde des humains des hollows en purifiant ces derniers à l’aide d’un zanpakutô (sabre étant en quelque sorte une matérialisation de l’âme de son propriétaire et dont la forme varie en fonction du shinigami). Le combat ne se déroulera cependant pas comme prévu et Rukia, blessée, se verra contrainte de léguer temporairement une partie de ses pouvoirs à Ichigo afin de sauver la situation. Mais l’énorme énergie spirituelle d’Ichigo finit par absorber la totalité des pouvoirs de Rukia et notre héros se retrouve malgré lui dans l’obligation d’endosser le rôle de « shinigami remplaçant ».

C’est ainsi que l’histoire et la chasse aux hollows est lancée. Nous suivrons donc les divers combats d’Ichigo (toujours accompagné de Rukia), devant désormais jongler entre son vrai corps et celui de shinigami tout en gardant son secret bien au chaud. L’auteur prend soin de nous présenter en parallèle les différents camarades de classe d’Ichigo, dont 2 d’entre eux deviendront les « héros secondaires » du manga : Orihime Inoue (secrètement amoureuse d’Ichigo) et Chad (très costaud et peu bavard). Ceux-ci seront ensuite rejoints par Uryû Ishida, un Quincy (que je vous laisse le plaisir de découvrir par vous-même).

C’est à partir du tome 7 que l’intrigue va entrer dans une autre dimension avec l’apparition des autres shinigamis. Cela marquera le début de ce qui s’avèrera être l’arc le plus abouti de la série. Nos héros prendront la direction de la Soul Society (lieu où sont envoyées les âmes purifiées et au milieu duquel vivent les shinigamis) dans un but bien précis (que je ne révèlerai pas ici) et se retrouveront rapidement embourbés au milieu d’un vaste complot. Trahison, surprises, combats dantesques et développement bien plus poussé de l’univers façonneront cet arc en quelque chose de tout simplement excellent ! Celui-ci se payera même le luxe de révéler celui qui deviendra par la suite le grand méchant de l’histoire.

Et c’est précisément à partir de là que « Bleach » finira petit à petit par s’écarter du droit chemin. Nous nous dirigerons ainsi vers la deuxième partie du manga dont le but ultime sera bien évidemment l’affrontement final face au « Big Boss ». Cette partie commencera de manière relativement intéressante via l’inclusion de 2 nouveaux genres de personnages. Mais au fil des tomes, l’intrigue se transformera en une simple succession de combats plus ou moins passionnants (dont certains seront franchement mémorables) et où les dialogues se feront de moins en moins présents (ceci impliquant la lecture de certains tomes en seulement 15 minutes…). Même le combat final tant attendu s’avèrera être une déception.
Nous pourrons ajouter à tout ceci que les compagnons de route d’Ichigo se révèleront d’une utilité très limitée, en particulier Inoue (faisant office le plus souvent de justificatif pour de nouveaux combats).
Mais les éléments les plus frustrants seront les nombreux non-dits de l’auteur à propos de faits très importants pour le scénario, la plupart liés à l’évolution de la puissance d’Ichigo. Ceci engendrera une perte de crédibilité et certaines incohérences. Alors simple oubli ? Panne d’inspiration ? C’est d’autant plus dommage car tout ceci aurait pu être facilement évité si M. Tite Kubo avait fait ne serait-ce qu’un petit effort afin de nous fournir ces réponses qui resteront, je le crains, à jamais enfouies au fin fond de la Soul Society.

Si je m’arrêtais là, vous vous demanderiez alors pourquoi ai-je attribué une telle note à « Bleach », n’est-ce pas ? N’ayez crainte, je vais tout vous dire !

Oui « Bleach » a de nombreux défauts, oui il n’a pas su garder la même qualité à la longue, mais il est tout de même loin d’être mauvais, bien au contraire !
Tite Kubo n’est peut-être pas un excellent scénariste, mais lorsque l'on évoque ses capacités graphiques, on se doit de tenir un tout autre discours. Malgré un style pas tout à fait au point au départ (comme n’importe quel manga), il a au fil des tomes su trouver ce coup de crayon qui le démarque tant des autres shônens sur ce plan. Il compensera donc de très belle manière son manque de créativité scénaristique : chaque planche étant pour lui l’occasion de placer ses personnages dans une mise en scène de toute beauté.
Autre point très intéressant et qui ravira sans aucun doute les allergiques aux héros un peu stupides et « gamins », omniprésents dans les autres shônens. En effet, Ichigo (mais aussi la plupart des autres personnages) fait preuve d’une maturité très appréciable. Il est également très attaché à sa fierté et son ego, impliquant le fait qu’il ne se pliera pas docilement aux volontés des autres protagonistes (amis ou ennemis), et ça fait plaisir à voir !
Enfin, pour continuer sur les personnages, il est également incontestable que beaucoup d’entre eux sont charismatiques et pourvus d’une grande classe (je pense notamment aux capitaines des shinigamis).

En conclusion, je soutiens grandement le fait que « Bleach » mérite sa place au panthéon des bons shônens. Il est simplement très dommage de constater qu’il ne manquait peut-être pas grand-chose pour le hisser bien plus haut, que ce soit de simples réponses ou une fin qui aurait dû arriver bien plus vite.

Je terminerai cette critique avec un petit mot vis-à-vis de l’arc en cours qui mettra un point final à cette longue aventure. Succédant à l’arc probablement le moins passionnant du manga, il faut avouer que l’on n’y croyait plus tellement. Et pourtant, il faut reconnaître que cet arc est une très grande surprise. Kubo abat ses dernières cartes, et nous constatons qu’il avait gardé de précieux atouts dans sa manche. Il réussit même à nous surprendre là où on ne l’attendait plus, faisant passer au premier plan des personnages jusqu’alors laissés de côté ou relativement peu approfondis. En bref, il faut avouer qu’il s’en sort très bien et arrive à retomber sur ses pieds malgré tout. Espérons maintenant que Kubo finira dignement son œuvre en lui offrant une jolie fin et ne fournira pas, au contraire, une raison supplémentaire de se faire taper sur les doigts.
XX_DobbY_XX
6
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le 24 mars 2013

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1 j'aime

XX_DobbY_XX

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