Btooom!
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Btooom!

Manga de Junya Inoue (2009)


Ils veulent qu'on joue à "BTOOOM!"... dans la réalité ?



Sakamoto Ryôta est un chômeur passant tout son temps sur BTOOOM!, un jeu vidéo online où les joueurs forment des teams et se battent à l'aide de différentes bombes appelées "BIM".
Cependant sa vie bascule le jour où il se retrouve sur une île avec d'autres personnes, chacune en possession de bombes comme dans son jeu fétiche et munies d'une puce greffée à la main. L'objectif est très vite défini : le jeune homme va devoir collecter huit puces pour pouvoir espérer retourner chez lui tout en tentant de survivre !



Game Start !



BTOOOM! est donc un de ces nombreux mangas qui reprend les codes du Battle Royal, mais il faut dire pour sa défense que lors de sa publication, rares étaient les mangas de ce genre.


Ainsi BTOOOM! reprend les mêmes codes mais là où il se démarque, c'est que l'auteur se sert des codes du jeu vidéo en faisant s'affronter les candidats avec l'aide de bombes qui, pour le coup, seront assez diverses. On retrouvera évidemment les bombes avec détonateurs, mais aussi des bombes chimiques, ou encore celles pouvant protéger son utilisateur et bien d'autres encore.


Le scénario se découpe en deux grandes parties. La première jusqu'au tome 13 qui monte crescendo où les premières alliances vont se créer et où les candidats trouveront des réponses plutôt convaincantes à leurs questions pour conclure sur un final hyper prenant. On enchaînera sur un arc en huis clos bien amené.


Puis arrive les douze derniers tomes… où la qualité diminuera au fil de la progression de l'histoire, en enchaînant sur du fan service tout simplement ridicule et des situations qui feront surtout éclater de rire avec son lot de facepalm, et une narration hyper lente où les héros prendront trois chapitres pour accomplir la moindre action, avant d'au final arriver à une conclusion sur laquelle je reviendrai.


Il faut noter malgré tout une trame en filigrane qui prendra de plus en plus d'importance, expliquant la raison de la présence de Ryôta et des autres personnages sur l’île, et il faut avouer qu'elle est bien trouvée.
On pourra sourire devant les théories complotistes des puissants dirigeant ce monde et des rebels vivant dans l'ombre qui s'y opposent sur lequel l'auteur se penche, mais le tout étant plutôt bien amené, parvient à rester cohérent avec le reste de l'œuvre de manière générale.



Deux fins pour une même œuvre



Comme dit plus haut, l'œuvre compte 27 tomes. En vérité, elle en compte 26 mais le dernier tome est sorti en deux versions (une alternative qui peut rappeler les jeux narratifs possédant plusieurs fins), à savoir la version Light -Amitié- et la version Dark -Vérité-. Une version se destinant donc aux fans de l'œuvre et des personnages, et l'autre version qui respectera la vision de l'auteur.


À vrai dire, l'idée d'une double fin ne me dérange pas vraiment même si pour ma part je suis plutôt partisan de la vision d'un auteur qui assume sa conclusion quitte à décevoir les fans, je trouve ça nettement plus audacieux. Et en ça, BTOOOM! me dérange. Outre le fait que pour découvrir les deux fins l'on doit acheter deux fois le même volume, c'est surtout que dans la vision de l'auteur (la Dark Ending), la conclusion annonce une suite. Une possible suite qui, en plus de faire terminer le manga sur une fin ouverte, détruit tout le message final qui est porteur d'espoir.


Personnellement j'ai préféré la Dark Ending pour son message, au contraire de la Light Ending qui est juste la fin de conte de fées classique où il manque juste le message "Et ils vécurent heureux tous ensemble et eurent beaucoup d'enfants".
Néanmoins il faut remarquer que pour la Light Ending, il n'y a pas de suite teasée. Le manga se conclue, on sait qu'il n'y aura pas d'autre événements à venir, ce qui pourra en intéresser certains, en particulier ceux n'aimant pas les fins ouvertes.


Cependant pour la Dark Ending, difficile de lui trouver des défauts car je l'ai trouvé beaucoup plus téméraire et surtout bien plus approfondie, et malgré ce qu'il s’y passe, elle porte tout de même un message d’espoir. Bref une fin quasi parfaite si on omet la dernière page qui se finit de manière ouverte et qui détruit absolument toute l'œuvre car au final on en revient à se dire « Tout ça pour ça, vraiment ? ».


Ainsi en ce qui concerne les fins de BTOOOM !, difficile de juger tant elles s'opposent radicalement, mais surtout le principal problème est que d'un côté on a une fin mièvre pleine de bons sentiments mais qui montre un manga terminé, et de l'autre on a une fin qui pourra en irriter certains en raison des choix scénaristiques de l'auteur mais qui montre un beau message qui se voit dans la page d'après détruite par une suite teasée qui n'arrivera certainement jamais, bref c'est dommage.


À noter néanmoins qu'au Japon depuis 2018, un spin-off est en prépublication sous le nom de BTOOOM! U-18. Après est-ce qu'il s'agit d'une vraie suite ou d'un simple spin-off, difficile de savoir pour le moment.



Chômeur, meurtrier, beau gosse, soldat, avocat, que de beau monde sur cette île !



En ce qui concerne les personnages, je m'attarderai seulement sur quelques uns d'entre eux :


Sakamoto Ryôta : Chômeur de 22 ans.
Ryôta est un personnage assez loser qui va manquer de peu de se faire tuer dès le début du jeu. Malgré tout il démontre très vite son expérience acquise sur le jeu en ligne en élaborant des tactiques dignes d'elle. Néanmoins son évolution est assez perturbante vu qu'il va craquer à un certain moment avant de se reprendre grâce "au pouvoir du fan service et du sexe". Bref, le pire étant qu'on verra très vite qu'il a l'armure du personnage principal, il ne risquera donc pratiquement rien et dès qu'on s'en aperçoit, difficile d'être pris d'empathie pour ce personnage qui en plus de ça, au contraire de certains candidats, méritait clairement sa place sur l’île.


Himiko : Jeune fille souffrant d'androphobie.
Un personnage qui dès de sa première apparition montre qu'elle va être l'objet de tous les fantasmes de Ryôta et pour cause ! La lycéenne est plutôt bien formée mais en dehors de ces attributs physiques, elle servira à bien peu de choses. Même si elle aura quelques combats qu'elle mènera seule (et encore, c'est surtout lorsqu'elle manquera de se faire agresser sexuellement), la plupart du temps elle servira de leitmotiv à Ryôta en étant la princesse en détresse et l'objet à fan service facile. Seul la fin Dark réhaussera un peu le niveau mais bon, à quel prix ?


Kira : Gamin de 14 ans qui est un meurtrier avéré.
Un tueur/ violeur/ taré, bref les adjectifs ne manquent pas pour décrire ce gamin. Mais malgré ses premières apparitions assez violentes, il parviendra à se trouver un groupe sur l'île qui lui enseignera de nouvelles choses et surtout, trouvera l'amour en un substitut de père. Un personnage donc qui évolue en bien et qui sert également de rival au personnage principal, une belle surprise !


Oda : Ancien ami de Ryôta qui n'a qu'un seul but : survivre.
Oda est l'ancien ami de Ryôta qui, suite à une bagarre au prétexte aussi profond que coucher avec la fille dont Ryôta était amoureux, l'a perdu de vue. Oda est l'archétype du gars qui est parti de rien pour surpasser son pote en tout. Sportif, sûr de lui, tactique, il ne désire qu'une chose, à savoir la victoire, et il est assuré de la remporter. Un personnage qu'on pourrait qualifier de cheaté tout simplement mais qui demeure assez charismatique lors de ses apparitions, en dehors de la fin où il régresse totalement pour n'être qu'un vulgaire pion aux yeux des organisateurs, alors que durant tout le reste de l'œuvre il est apparu comme quelqu'un d'ingénieux. Mais pour sa défense, ce changement de comportement se justifiera par le choix d'offrir un ultime climax à l'œuvre qui n'en avait pas tant besoin.


Il y aura également de nombreux autres personnages, les candidats étant au nombre de 32. Bien que beaucoup d'entre eux soient tout simplement de la chair à canon, il faut noter l'effort de l'auteur pour avoir introduit une à deux pages de background pour la plupart afin de présenter quelques moments de leur vie.


Par ailleurs, la raison qui fait qu'ils sont envoyés sur l'île est souvent ridicule, autant pour Kira ça peut se comprendre mais pour Himiko… Enfin pour les personnages, même si la plupart évoluent, on retrouvera les personnalités typiques de ce genre d'œuvre comme le pacifiste, le tueur sanguinaire, le manipulateur, mais la plupart s'avéreront bien plus intéressants que ce que pouvait laisser présager leur première apparition en fin de compte.


Il y a aussi ceux gérant le jeu et d'autres personnages qui interviendront en arrière-plan mais qui, pour la plupart, ne seront que des personnages très stéréotypés qui lanceront de grande tirades qu'on pourrait résumer en « Houhou, nous sommes puissants et machiavéliques ! » et ne serviront malheureusement pas à grand-chose d'autre.



L'armure du scénario



Au niveau du rythme, comme je l'ai dis plus haut, il est assez varié. Mais là où ça pose problème c'est au niveau de l'histoire qui, à partir d'un certain point, vire dans le ridicule et va ralentir voire même carrément stagner.


Si le premier arc propose un rythme varié entre affrontements et moments calmes pour approfondir les relations entre les protagonistes tout ça sur plusieurs jours, dans le second arc c'est le contraire, les douze derniers tomes se déroulent sur une seule journée. Certes il y aura de nombreux combats, certains palpitants, d'autres non, mais on alternera aussi avec des phases de flashback pour découvrir les derniers candidats encore inconnus dont ironiquement, certains seront déjà morts. Et le plus gros problème de cette partie de l'intrigue revient à ce qu'on pourrait appeler "l'armure du scénario" qui rendra certains personnages tout bonnement invincibles. Ils auront beau se prendre des BIM de toutes sortes ou manquer de tomber dans des pièges mortels, ils se relèveront toujours tels des dieux !


Prenons Ryôta par exemple, qui manquera de mourir plus de dix fois en moins de 24h. On pourrait croire qu'il serait fatigué mais non, il sera toujours debout malgré le nombre de BIM auxquelles il parvient à échapper in extremis, ce qui rend la plupart des situations risibles. Alors certes, c'est le principe du manga qui veut ça, mais là où dans les premiers tomes le héros cherchait justement à économiser ses forces, ici ce ne sera pas le cas malgré tout ce qui lui tombe dessus (et il y en a), il aura toujours autant d’énergie à revendre, incroyable !
Et lorsqu'il craquera mentalement (car tout de même, ce n'est pas comme si il avait assisté à un véritable génocide et qu'il avait lui-même a quelques morts à son actif), qu'il sera au bout et qu'il perdra totalement la raison, comment reviendra-t-il à lui-même ? En manquant de coucher avec Himiko dans une des scènes les plus dérangeantes que j'ai pu lire... Bravo Ryôta, tu n'es pas un Pedobear, congratulations !


Je ne parlerai pas du dernier candidat qui sera juste un gagne-temps d'une dizaine de chapitres et qui ne servira à rien d'autre qu'essayer de tout faire pour pousser Himiko et Ryôta à coucher ensemble, ce qui devient très malsain avec la différence d'âge (Himiko ayant 15 ans et Ryôta, 22).
On notera aussi l'apparition en deuxième partie de la gamine aux pouvoirs surnaturels qui sera le prétexte idéal pour sauver la mise des personnages qui ne doivent pas encore mourir bien qu'ils devraient, par exemple un des candidats évitera toutes les attaques des BIM car il verra ses anciens collègues tués lui indiquer la route à prendre. Bref merci le surnaturel, mais clairement y'avait pas besoin de ça.



Des batailles intenses et un (énorme) brin de fan service !



En dehors de ce détail, l'auteur possède malgré tout un style assez efficace avec des dessins très réalistes, et parvient à bien découper les scènes d'action tout en maintenant un rythme haletant. Le découpage des cases est cependant très classique, mais il faut avouer que les doubles-pages lors des combats et utilisations de BIM sont visuellement superbes.


Malgré un chara design assez basique, l'auteur parvient à mettre les personnages principaux en valeur. Himiko par exemple qui, malgré ses origines japonaises, ressemble à une étrangère blonde aux yeux bleus et aux attributs bien fournis, ou encore Ryôta qui revêtira très vite le tee-shirt Btooom!, rappelant à chaque instant l'ironie amère de ce qu'il est en train de vivre.


On notera également la présence de fanservice qui, s'il est "léger" au début de la série (avec notamment des seins découverts) sera de plus en plus accentué vers la fin et qui, en plus de donner un prétexte scénaristique pour faire stagner l'intrigue sur tout un tome, sera plus gênant qu'autre chose, en particulier lorsqu'on voit l'âge des protagonistes.


Pour conclure, BTOOOM! est un manga qui demeure sympathique à lire, notamment sur sa première partie qui est vraiment prenante et monte crescendo jusqu'à sa conclusion. Cependant, malgré des thèmes intéressants qui seront malheureusement beaucoup trop sous-exploités, l'auteur préférera tisser une intrigue à rallonge en faisant dans sa seconde partie une journée de 24h certes haletante mais beaucoup trop lente au niveau du rythme pour demeurer palpitante. De plus, on apprendra vite à cerner les personnages qui ne risquent rien et c'est à partir de cet instant que le manga perd très vite de son intérêt.


En résultera deux fins qui iront aussi bien aux fans qu'à ceux préférant la vision d'un auteur qui ne se mouille pas et préfère teaser une éventuelle suite pour ceux ayant préféré la version Dark.

DuotakunoSora
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le 30 mars 2021

Critique lue 173 fois

Duotaku_no_Sora

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