Avec Doubt de Yoshiki Tonogai, sorti en 2009, on entre dans un jeu de massacre sous haute tension, où des lapins sont traqués par un loup dans une ambiance de thriller psychologique. Tout semblait en place pour une expérience haletante et dérangeante, mais au fil des pages, ce huis clos ressemble plus à une partie de loup-garou improvisée où les règles ont été oubliées.
L’histoire repose sur un concept séduisant : un groupe de jeunes coincés dans un lieu mystérieux doit découvrir qui, parmi eux, est le "loup", tout en évitant d’être éliminés. Le manga s’ouvre sur une promesse intrigante, mais la tension retombe vite, étouffée par des clichés et des twists qui s’annoncent à l’avance comme un panneau clignotant sur une autoroute.
Côté personnages, chacun est équipé de son petit stéréotype bien pratique : le leader, la victime, le méchant potentiel… Tout est là, mais aucun ne dépasse vraiment son rôle. Le lecteur, plutôt que de se laisser surprendre par leurs interactions ou leurs révélations, se contente de cocher les cases comme dans un bingo du thriller classique. Résultat ? Au lieu de s’investir émotionnellement, on devient spectateur d’une intrigue qui semble jouer en mode automatique.
Le dessin, en revanche, est un atout majeur. Tonogai maîtrise l’art de l’atmosphère oppressante, avec des visages expressifs, des ombres bien placées, et des décors qui ajoutent une couche de malaise bienvenue. Si seulement l’écriture avait été à la hauteur de cette ambiance visuelle, on aurait eu un cocktail parfait. Mais même les meilleurs graphismes ne suffisent pas à cacher les faiblesses d’un récit qui fait trop souvent du surplace.
Et puis, il y a le twist final. Ah, ce fameux twist. Là où un bon retournement de situation devrait laisser le lecteur abasourdi, celui de Doubt provoque surtout un haussement de sourcils sceptique. La logique vacille, et les motivations des personnages semblent bricolées à la dernière minute. Plutôt que de boucler la boucle avec finesse, le manga laisse un arrière-goût de confusion frustrante.
En résumé, Doubt n’est pas sans mérite : son concept de base et son ambiance visuelle peuvent captiver. Mais il échoue à exploiter pleinement son potentiel, s’égarant dans des choix scénaristiques convenus et des personnages trop superficiels. Une partie de "qui est le coupable" qui amuse au début, mais qui finit par donner envie de ranger le plateau avant même la fin.