Publié en 2009 en Espagne et traduit en 2011 en français, ce roman graphique d'Antonio Altarriba, dessiné par Kim, avait l'air suffisamment intéressant d'emblée pour que je l'offre à une amie chère et férue de guerre d'Espagne, sans l'avoir lu. C'est maintenant chose faite, et je ne regrette donc pas : l'histoire est magnifique, quoique dure à plus d'un titre, et la mise en images est somptueuse.
Issu d'une histoire vraie (le suicide, à 90 ans, du père de l'auteur, vétéran de la guerre d'Espagne qui se jeta du quatrième étage de sa maison de retraite), le récit n'a pourtant rien de sordide, mais éclate d'un réalisme cru, dans lequel apparaîtront, tour à tour, la rudesse presque sans espoir de la vie campagnarde espagnole des années 1930, l'aveuglement populaire face au coup d'état franquiste, le comportement davantage qu'honteux des autorités françaises vis-à-vis des réfugiés républicains en 1939, les ambiguïtés de la survie en France en temps de guerre, les désillusions de l'après-guerre et les innombrables compromissions avec le régime, une fois de retour au pays,...
Il fallait cette mécanique précise et parfois rêveuse pour faire apparaître l'acte final comme une forme rare de délivrance poétique, avec la bienveillance éclairée du fils-auteur - qui ne pouvait se délivrer d'une histoire pareille qu'en l'écrivant, en BD pour transmettre mieux encore le caractère imagé de toutes les confidences paternelles recueillies par oral...
Dur et superbe, donc.
Une note de lecture plus complète est désormais disponible sur mon blog : http://charybde2.wordpress.com/2015/06/26/lecture-bd-lart-de-voler-antonio-altarriba-kim/