A peine en arrive-je au deuxième tome que déjà un constat se pose concernant ce « Thorgal » : cette saga génère chez moi des sensations vraiment contradictoires – avec pas mal de montagnes russes – mais pour au final quand même obtenir mon adhésion.
Disons pour être plus clair que d’un côté je me laisse totalement prendre par le postulat très audacieux qui est posé par la série...
(Cette combinaison entre vieux monde médiéval nordique chargé de ses propres mythes et trip new-age d’Atlantes venus de l’espace c’est juste… « woh ! »)
Mais d’un autre côté, je subis régulièrement des douches froides quand je constate sous quel angle cet univers est parfois traité.
A dire vrai, j’ai vraiment l’impression que, pour le coup, je me bouffe avec cet album tout ce que la fin des années 1970 et le début des années 1980 ont été capables de faire de meilleur et de pire (…car n’oublions pas que l’album a été publié en 1980.)
Pour le coup, quand je lis cet album, je ne peux m’empêcher de penser à l’état d’esprit qui animait les dessins-animés produit par la DIC, comme « Les merveilleuses cités d’Or » dans lesquels on sentait déjà la transition s’opérer entre d’un côté la décennie prospère pétrie d’optimisme qui s’éloigne et de l’autre les désillusions et le cynisme nihiliste du monde qui est en train de se dessiner.
Le passé et le présent se percutent ; les vieilles croyances et les nouvelles technologiques se rencontrent ; quant aux miracles du progrès, ils se doivent d’être en permanence contrebalancés par les excès et la destruction qu’on nous présente comme quasiment inévitables.
Cet aspect-là, pour le coup, c’est ce que je préfère de cette période.
Je trouve qu’on a perdu depuis cette sécheresse et cette rudesse qui ont pourtant quelque-chose de fascinant et de séduisant.
En cela, cette « Ile des mers gelées » incarne cette atmosphère à la perfection.
Ce qu’on y trouve est un parfait mélange des beautés et des promesses permises par la technologie, tout en affichant en parallèle l’aliénation des masses et la mort prochaine qu’elle apporte de manière presque indissociée.
Cette beauté crépusculaire, elle fonctionne vraiment pleine balle sur moi…
Dommage donc qu’à côté de cela, le pire de cette période me soit aussi revenu à la tronche lors de ma dernière relecture.
Je pense notamment à la dimension assez kitsch de ce qui nous est raconté et montré ; je pense aussi à la manière très réductrice de développer certains personnages, notamment les personnages féminins.
Aujourd’hui, il serait impensable de voir une Aaricia définie comme elle l’est dans cet album…
Mais bon… L’un dans l’autre ça a son charme.
Et comment reprocher à une B.D. de 1980 de fleurer bon son époque ?