Un trip cosmique entre lumière divine et fumée d’encens douteux

Avec L’Incal, Alejandro Jodorowsky et Moebius vous embarquent pour un voyage intergalactique où les frontières entre le génie, la folie et la mystique se brouillent joyeusement. Publiée en intégrale en 1993, cette œuvre est un mélange explosif de science-fiction métaphysique, d’humour décapant, et de visions psychédéliques qui vous laissent parfois bouche bée… ou totalement perdu dans l’hyperespace.


L’histoire suit John Difool, détective privé de bas étage, aussi courageux qu’un flan tremblotant, qui se retrouve malgré lui gardien de l’Incal, un artefact cosmique de pure lumière. Ce qui commence comme une mission simple (éviter de mourir) se transforme en une quête pour sauver l’univers tout entier. Rien que ça. Entre prophéties ésotériques, guerres galactiques, et dialogues improbables, Difool évolue dans un monde où tout – absolument tout – semble vouloir l’écraser, spirituellement ou physiquement.


Côté visuel, Moebius est au sommet de son art. Ses dessins transcendent les pages, avec des décors futuristes d’une richesse incroyable, des créatures excentriques, et une fluidité dans l’action qui confine à l’hypnose. Chaque case est une œuvre d’art en soi, une explosion de détails et de couleurs qui mérite qu’on s’y attarde. Mais ce déluge visuel peut aussi fatiguer : à force d’être constamment époustouflé, on finit par avoir besoin d’une pause… ou d’un guide pour comprendre ce qui se passe.


Et c’est là que Jodorowsky entre en scène, armé de son amour pour la philosophie mystique et les récits déjantés. Le scénario est une véritable montagne russe narrative, mêlant satire sociale, spiritualité new age, et coups de théâtre improbables. Certaines idées sont géniales, d’autres vous laissent perplexe, comme si Jodo avait écrit sous l’influence d’un cristal cosmique en rotation. Le mélange peut séduire autant qu’il déstabilise : tantôt lumineux, tantôt chaotique, L’Incal est une œuvre qui ne s’explique pas toujours, mais qui se ressent profondément.


Les personnages, quant à eux, sont aussi hauts en couleur que le décor : John Difool, éternel anti-héros, est à la fois pathétique et attachant ; Deepo, son oiseau de compagnie, apporte une touche d’humour grinçant ; et les multiples figures cosmiques qu’il croise semblent tout droit sorties d’un délire mystique de haute voltige. Chaque interaction ajoute une couche de complexité à un récit déjà bien chargé.


Cependant, L’Incal n’est pas exempt de défauts. Sa narration peut sembler décousue, et son ambition presque écrasante. Les monologues philosophiques et les scènes de transcendance spirituelle risquent de perdre les lecteurs moins sensibles aux quêtes existentielles. Mais même dans ses moments les plus chaotiques, l’œuvre reste fascinante, comme un puzzle interdimensionnel dont les pièces ne s’imbriquent pas… mais forment tout de même un tableau captivant.


En résumé, L’Incal est une odyssée cosmique qui mêle le sublime et l’absurde, le profond et le WTF, dans un déluge visuel et narratif unique. Une œuvre qui se lit autant avec les yeux qu’avec l’esprit, à condition d’accepter de se perdre un peu dans le vide intersidéral. Préparez-vous à plonger dans un univers où la lumière brille fort… mais où les ombres sont tout aussi fascinantes.

CinephageAiguise
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le 13 déc. 2024

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