Après un premier épilogue aussi trépidant que frustrant à quelques égards, Jean Van Hamme reprend le récit là où il l'avait laissé. XIII a toujours un sacré trou de mémoire et il voudrait bien savoir qui il est. Le voilà donc qu'il se lance seul dans une enquête sur sa propre identité au fin fond d'un bled paumé. Et au fond du bled paumé, avec un nouveau nom en tête pour savoir qui il est, le voilà qui replonge dans les emmerdes. Le Jason Fly en question est évidemment lié à une vieille histoire que les notables et les flics ripoux de la ville voudraient faire oublier. L'étau se referme alors très vite sur lui, la Mangouste qui a entendu parler de son expédition lui file le train, et Jones est prête une nouvelle fois à voler à sa rescousse. En somme, rien de nouveau avec cet opus de relance mais force est de constater que les codes sont tous parfaitement maîtrisés et que le récit sait se montrer haletant.
On y retrouve une Amérique profonde avec ses sales histoires, ses notables qui dirigent en sous-main la ville, ses hommes de main rustres et ses arrangements entre amis. Typique des récits au parfum de western moderne, l'arrivée de l'étranger dans la ville remue de vieux souvenirs et fait tomber les masques. L'intrigue est resserrée autour de quelques personnages et les péripéties s'organisent avec efficacité. Entre les démarches menées par XIII, d'un côté, et l'enquête conduite par Jones de l'autre, on retrouve ce goût du récit dédoublé qui fonctionne à merveille. L'ensemble est d'autant mieux réussi que le dessin y est impeccable (le trait de William Vance paraît enfin plus sûr) et le climat neigeux confère une atmosphère tout à fait particulière à l'opus.
Bien entendu, des ressassements se font jour. Jean Van Hamme recycle les tics de récit qu'il a déjà proposés et William Vance propose des variations autour des visages qu'il a déjà dessinés lors des épisodes précédents. Mais c'est fait avec soin et efficacité, tant et si bien qu'on a le sentiment que le duo cherche à parfaire ce qu'il a déjà précédemment esquissé. Le rythme est soigneusement soutenu, en tout cas davantage que lors du précédent tome où la trop grande richesse des péripéties finissait par gâcher le plaisir. Ici, on a bien compris que la nouvelle direction prise par le récit ne se règlera pas dans cet album, Jean Van Hamme prenant, de fait, le temps nécessaire pour valider chaque étape de son histoire. C'est franchement une réussite qui sent bon les thrillers aboutis des années 70 ou 80 et on attend la suite avec impatience. Un très bon opus.