Les Aigles de sang, premier tome d’Alix Senator, c’est un peu comme retrouver un vieil ami d’enfance… qui aurait pris un sacré coup de vieux, mais reste fascinant à écouter. Valérie Mangin et Thierry Démarez reprennent l’univers du légendaire Alix pour lui donner un sérieux lifting narratif et esthétique, plongeant les lecteurs dans une Rome impériale sombre et pleine de secrets.
Alix, désormais quinquagénaire (oui, il a troqué ses sandales d’aventurier contre des rides et un air grave), évolue dans un monde où la politique est aussi tranchante que les dagues cachées sous les toges. Ce premier tome instaure un climat de complots sanglants, où les héros d’hier doivent affronter non seulement des ennemis externes, mais aussi leurs propres doutes et faiblesses.
Visuellement, Thierry Démarez fait un travail impressionnant. Ses décors de Rome sont somptueux, regorgeant de détails qui donnent vie à cette époque fascinante. Chaque case transpire une atmosphère lourde, presque crépusculaire, qui colle parfaitement à l’intrigue. Les personnages, bien qu’expressifs, manquent parfois d’un peu de chaleur, accentuant ce sentiment de froideur et de tragédie qui plane sur l’histoire.
Valérie Mangin, de son côté, livre une intrigue ambitieuse et adulte, marquée par une violence psychologique et physique qui tranche avec l’esprit original de Alix. Si ce choix apporte de la profondeur, il peut aussi dérouter les nostalgiques des aventures classiques, où l’espoir semblait toujours au coin de la route. Ici, tout est plus sombre, plus complexe, et plus ambigu, avec des personnages qui cachent leurs vérités derrière des masques bien romains.
Le principal reproche qu’on pourrait adresser à ce premier tome, c’est son rythme parfois un peu lent. L’intrigue met du temps à décoller, et certains passages s’étirent dans des dialogues lourds qui pourraient perdre les lecteurs en quête d’action. Mais cette lenteur permet aussi de poser les bases solides d’une saga qui promet d’être riche en rebondissements.
En résumé : Les Aigles de sang est une réinvention audacieuse d’un classique, où le souffle épique laisse place à une gravité intense et un réalisme impitoyable. Une lecture captivante pour ceux qui aiment leurs intrigues historiques pleines de complots et de tensions, mais peut-être un peu trop sérieuse pour les amateurs de l’Alix des origines. À lire si tu es prêt à troquer l’aventure insouciante contre une immersion dans les ombres du pouvoir romain.