Autant les deux premiers tomes avaient su me surprendre de par leur habilité à jouer des codes et des formes, autant c’est avec ce troisième tome que j’ai connu mon premier dégrisement avec cette saga « Largo Winch ».
Alors certes, déjà dans les deux tomes précédents, l’équilibre était déjà précaire : on flirtait facilement avec les gros méchants ripoux d’opérette et les filles à gros nichons, mais je trouvais malgré tout que Van Hamme savait aller au-delà de ça pour jouer du charme des archétypes plutôt que de simplement se vautrer dans la beaufitude facile.
Là, avec cet « O.P.A. » j’avoue que la balance s’est mise à pencher du mauvais côté.
D’une part on a une intrigue qui met du temps à dévoiler tous ses enjeux tout en peinant à voiler ses mystères, et puis de l’autre côté Van Hamme dilue la sauce en jouant clairement la facilité et la politique des bas-instincts.
Dans ce troisième tome, le Largo Winch impertinent mais détaché n’est plus. Il se laisse séduire par la première jeunette à gros seins qui passe, il se comporte en véritable petit con avec pas mal de monde, enchaine les petites mésaventures peu reluisantes et intéressantes…
En d’autres termes, ça n’a pas d’intérêt.
…Ou plutôt – pour être plus exact – ça aurait pu avoir de l’intérêt si ça avait été bien fait.
Parce qu’en soi c’est très intéressant de s’imaginer comment Largo Winch – tout homme distancié qu’il est – peut progressivement se laisser corrompre sans forcément s’en rendre compte.
Par exemple moi je trouve cette idée d’amener le fisc dans les pattes de Largo vachement mal exploitée.
Après tout l’institution qui vient réclamer son dû est dans son droit, et ça aurait pu être vachement intéressant de voir Largo se laisser séduire par l’idée de se délester d’un milliard pendant que Cocherane et consorts lui auraient démontré la vulnérabilité dans laquelle une telle stratégie plongerait le groupe au profit de gros rapaces pires qu’eux.
Dans ce cas de figure, je trouve que ça aurait considérablement gagné en intérêt et en subtilité, Largo se faisant bien plus bouffer que prévu par l’héritage de Nerio.
…Mais non, au lieu de ça : Largo se comporte juste comme un salaud de capitaliste déjà acquis à la cause de l’accumulation maladive de capital, s’en lavant juste les mains en disant « désolé, mais c’est Nerio qui a mis en place ce stratagème, je suis bien contraint de le reprendre. » (Bah sauf que non en fait.)
Et alors que ce tome 3 aurait ainsi pu poursuivre intelligemment l’exploration de cette thématique du héros aliéné de plus en plus par son propre pouvoir, on se retrouve juste avec de la grosse ficelle qui certes, tient le gigot, mais ne lui donne vraiment aucune finesse ni profondeur.
D’ailleurs – comble du comble – non seulement ce tome traine en longueur avec des arcs narratifs peu intéressants, mais en plus il ose n’y apporter aucune résolution.
Non, à la place, on se bouffe juste un banal : « la suite au prochain épisode ».
Mouaif… En garder sous le coude dans l’espoir de spéculer sur la longueur, moi ce n’est vraiment pas le trip dans lequel je me retrouve le plus.
Au contraire, chez moi c’est même le meilleur moyen de faire crever la bulle de mon intérêt pour cette saga.
Mais bon, ne jugeons pas trop vite.
Wait and see…
Ne vendons pas tout de suite.
Avec Van Hamme y’a toujours moyen qu’un jour on retrouve nos billes…