Album du divorce entre Franquin et Spirou - ce personnage qui ne sera jamais sien - QRN sur Bretzelburg est pourtant un régal, un festival au crépuscule des aventures du groom de Marcinelle mises en scène par le géniteur de Gaston (Il ne signera en effet plus qu'une aventure Panade à Champignac pour offrir un baroud d'honneur à son cher Zorglub).
Accompagné par Greg au scénario, Franquin, surnageant dans sa dépression, dessine presque rageusement cette aventure, subissant la cadence de la publication hebdomadaire dans le Journal Spirou comme un fardeau. On aurait pu alors craindre une perte de qualité, c'est tout le contraire. Le trait de Franquin, toujours aussi méticuleux frôlant avec la maniaquerie, allie la tension et la maîtrise, l'ensemble est remarquablement vif, nerveux, le dynamisme des personnages est réhaussé comme jamais.
Niveau scénario, QRN sur Bretzelburg s'ouvre avec l'hilarant souci posé par un transistor bloqué dans le tarin d'un Marsupilami décontenancé, agacé puis furieux d'avoir du Mireille Mathieu qui lui sort par les narines. Par la suite, on sent un Franquin quinze ans avant ses Idées Noires déjà concerné par les soucis d'un monde en pleine guerre froide et course à l'armement. Spirou et Fantasio sont en effet entrainés dans les intrigues politiques d'une dictature bucolique, pourtant miséreuse. Le scénario est un petit bijou, son dénouement a cette pointe de happy ending un brin trop sucrée qui laisse transparaitre l'angoisse de l'auteur sur la réalité de son époque.
A noter que cet album donne faim. Je vous laisse découvrir.
Bien qu'il ne soit pas mon Spirou & Fantasio préféré, amours de lecture d'enfance oblige, force est d'admettre que QRN sur Bretzelburg est l'un des plus beaux joyaux, si ce n'est le plus beau, de la série des Spirou & Fantasio.