Slam Dunk
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Slam Dunk

Manga de Takehiko Inoue (1990)

Coïncidence : l’année de fin de Slam Dunk (1996) est aussi celle du début de son éditeur français (éditions Kana) qui publiera ce titre entre 1999 et 2004. Cela fait donc 20 ans que Slam Dunk est terminé ! Prépublié dans le Shônen Jump, premier manga à parler basket, la série de Takehiko Inoue fera mentir les éditeurs qui lui signifiaient que sa série était vouée à l’échec.


Un détour par Naruto


Si Masashi Kishimoto a été influencé par, entre autres, le travail de Hiroaki Samura dans l’Habitant de l’Infini (voir l’entretien entre les deux mangakas à venir début novembre dans le tome anniversaire de la série chez Casterman), Slam Dunk a aussi joué un rôle, comme il s’en explique dans un des tomes de Naruto (n°14, p. 44 et 62). Alors étudiant, Kishimoto demande à ses amis un jour qu’ils venaient de terminer un chapitre de Slam Dunk paru dans le Shonen Jump, qu’est-ce qui différenciait ce manga des siens ?


Réponse : « Quand on lit, on comprend que Takehiko Inoue est passionné de basket-ball. Il écrit son manga avec plaisir, et cela aussi, il arrive à le transmettre… » Prendre du plaisir dans ce que l’on fait est un facteur important pour qu’une série marche.


Slam Dunk est donc un manga de passionné. Takehiko Inoue aime le basket. Il l’a pratiqué étant jeune, continue à faire quelques paniers quand il en a l’occasion. S’il n’a pas percé dans le milieu, il demeure chez lui un véritable amour pour ce sport (qui se retrouvera avec le tournoi de basket intergalactique Buzzer Beater mais aussi, et surtout, au niveau du handi-basket avec Real). Un amour qui transparaît dans Slam Dunk.


Les Bad Boys de Shôhoku


Pour communiquer sa passion, Takehiko Inoue utilise différents moyens, permettant tout à la fois de rendre accessible son manga en plus de susciter un intérêt qui va en s’accroissant pour l’équipe que nous allons suivre : celle du lycée de Shôhoku. Nous entrons dans cette équipe par l’intermédiaire du personnage principal de Slam Dunk : Hanamichi Sakuragi, élève de seconde. C’est un furyô, qui se met au basket à son entrée au lycée pour séduire Haruko (qui est la sœur du capitaine de l’équipe de basket, le pivot Takenori Akagi surnommé « le gorille »). Problèmes : i) Haruko en pince pour la nouvelle recrue de l’équipe, l’ailier peu bavard Kaede Rukawa ; ii) à part sauter et faire un « slam dunk » Sakuragi ne connaît rien au basket. Il doit tout apprendre.


A partir de là, trois mouvements sont à l’œuvre : i) Sakuragi va se développer en tant que joueur et personne (en plus de perdre des cheveux) ; ii) sa rivalité avec Rukawa va nous offrir une des plus belles relations du manga ; iii) l’équipe de Shôhoku va se construire au fil des matchs mais, aussi, en récupérant deux éléments eux aussi « à problèmes » : le meneur Miyagi et le shooteur à trois points Mitsui. Mais les bagarres, les amourettes… vont être rapidement évacuées (le succès de la série aidant) pour que tout soit concentré sur le basket et le tournoi national inter-lycée.


Win or go home


Le capitaine de Shôhoku rêve du titre national. Mais pour l’obtenir son équipe devra se qualifier et affronter des équipes souvent mieux classées et cotées. La victoire est impérative pour aller le plus loin possible. Cela donne l’occasion de vivre les matchs de basket comme si on était sur le terrain ou sur le banc, j’y reviens un peu plus bas.


Les matchs montrent une forte intensité, des joueurs fatigués, beaucoup de transpiration. Il y a peu de remplacements et il faut aller au bout de soi. Plus que l’affrontement de deux équipes, une partie de basket devient l’espace où l’on confronte des manières de vivre. Slam Dunk c’est aussi l’école de la vie, où l’on apprend que si le basket est le plus individuel des sports collectifs, on ne peut pas tout faire tout seul. Solidarité, amitié, dépassement de soi, confiance en soi et dans les autres (la passe !)… on trouve cela, et bien plus encore, dans le manga.


Nothing but net!


Si Slam Dunk se révèle si agréable à suivre, si le manga est tellement prenant il le doit à ses graphismes. Lorsque Takehiko Inoue se lance dans Slam Dunk il a 23 ans. Aussi au fil des tomes, son trait évolue, il n’y a qu’à comparer le Sakuragi du début et celui qui a une nouvelle coupe de cheveux. Il devient plus précis, gagne en réalisme et déjà accorde une grande importance aux yeux. Le graphisme devient alors tout simplement magique pour nous faire ressentir les actions présentées. L’auteur a regardé beaucoup de matchs pour arriver un tel résultat (voir ici pour un comparatif entre certaines planches de Inoue et des clichés NBA de l’époque). Mieux : l’auteur arrive aussi à nous faire ressentir toute l’intensité qu’il y a dans le fait de défendre, attaquer, prendre un rebond, marquer, faire une passe…


Le basket est aussi un sport où le temps compte : chaque équipe a le ballon durant une durée limitée (après elle doit tirer ou alors le ballon sera rendu à l’adversaire). Il faut donc être vigilant par rapport à l’horloge. L’auteur couple parfaitement cela avec les points qui précédent pour décomposer une scène (ralentir le temps), passer rapidement telle ou telle période du match pour se concentrer sur celles qui sont essentielles… C’est pour cela que le match de la série (soit 40 minutes) s’étend de la fin du tome 25 au tome 31 ! Pour le dire autrement : comme le rappelle l’auteur, il a travaillé pendant six ans sur sa série alors que dans Slam Dunk il ne s’écoule que 4 mois.


A cet égard, la fin du match contre Sannô est un modèle du genre, notamment les 12 dernières secondes qui représentent pas loin de 50 pages et ne contiennent aucun mot (à part une phrase de Sakuragi), comme si le temps ralentissait, nous coupant de ce que la foule peut dire, de ce que les joueurs peuvent penser pour nous offrir la quintessence de ce qui se passe sur le terrain, sans aucun parasitage.


MVP! MVP! MVP!


Le plus surprenant dans Slam Dunk est peut-être sa fin, qui participe aussi à l’envie de voir une suite. Cette idée est présente chez Inoue, comme il l’a dit en 1998 et en 2013 tout en précisant, à chaque fois, qu’il devait se sentir prêt pour la faire, condition qui n’est pas remplie pour le moment.


Comme dit plus haut, le manga est porteur de valeurs qui déborde largement le cadre du sport et nous fait suivre une équipe à laquelle on s’attache très rapidement. Véritable concentré d’action Slam Dunk est un manga sans réel temps mort où l’auteur s’est investi dans tous les personnages. Un manga du Hall of Fame !


Critique version longue et illustrée à retrouver par ici.

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le 8 août 2016

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Anvil

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