Spider-Man : La Dernière Chasse de Kraven par Jben
Ce récit est un peu un ovni dans la production Spider-Man.
Scénarisé par J.M DeMatteis en 1985, il s'agit d'une saga en six parties mettant en scène l'un des vilains principaux de Spider-Man : Kraven, de son vrai nom Serge Kravinov.
Ce méchant est à la base, assez générique, plutôt kitsch, et pas spécialement intéressant, il a été créé en 1964 par le classique duo Lee/Ditko. Bref, un second couteau du Spider-verse. L'histoire est simple : pour se venger de Spider-Man qui l'a a maintes reprises humilié, Kraven le chasseur décide de le droguer, de l'enterrer vivant et de le laisser pour mort. Durant ce laps de temps, il prend sa place et endosse le costume de l'araignée, et rend une justice aussi brutale qu'expéditive. Le but ? Prouver à son ennemi juré qu'il le surpasse dans son rôle le plus fondamental, dans sa condition de super-héros.
En réalité, le scénariste nous invite à pénétrer l'esprit torturé en proie à la folie de Kravinov. Pourtant, Kraven est à la base sain d'esprit, mais ayant vaincu son antagoniste, il sombre dans la folie et la bestialité. Ce récit est d'ailleurs empreint de cette thématique : Peter Parker meurt araignée et ressuscite humain, Kraven a au contraire sacrifié son humanité pour une bestialité assumée. Il embrasse la conception de l'honneur et rejette la civilisation. Ce cheminement symétrique s'exprime aussi dans la construction narrative, avec une véritable progression de ces deux statuts, il y a là comme un parallélisme.
Vous l'aurez compris, cette histoire est bien plus profonde que le comics de super-héros de base. J.M DeMatteis a confié qu'à la base, cette histoire ne devait pas concerner Kraven, mais découvrant ses origines russes, il a été motivé par son maître à penser, Dostoïevski, pour fournir une histoire qui serait le motif à l'introspection psychologique d'un personnage torturé qui sombre dans la folie. Un traitement qui n'est pas sans rappeler "The Killing Joke" d'Alan Moore, peut-être en moins subtil cependant. Il ne faut en tout cas pas s'attendre Spider-Man à balancer vannes sur vannes dans ce tome, l'histoire est sombre et complexe.
Et la partie artistique rend totalement bien cet état d'esprit. Premièrement, l'histoire se déroule du temps où Spider-Man portait son costume noir (porteur de Venom) nouvellement acquis. Ensuite, malgré l'époque, les couleurs sont tout sauf criardes, c'est sombre, l'encrage est appuyé, il y a un côté presque glauque. Un traitement graphique est parfait pour cette histoire.
Kraven's Last Hunt, c'est donc l'un des récits fondamentaux sur Spider-Man, un coup de génie de J.M DeMatteis qui propose une histoire sombre, une véritable plongée dans l'esprit détraqué de Kravinov.
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